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Bulletin 104

Semaine 30- 2004

La guerre et la prostitution à l'échelle industrielle
La guerre, c'est connu, abolit les rapports de droit et laisse libre cours au rapport de force, sous toutes ses formes. Il en va des rapports hommes/femmes comme des autres. Si le viol est historiquement la forme la plus banale, une espèce de droit de cuissage de l'armée victorieuse sur les femmes des vaincus et s'il a pu être magnifié dans les idéologies impériales (voir l'enlèvement des Sabines), il se produit aussi à l'intérieur même des armées comme en témoignent les quelques plaintes déposées par des soldates Us en Irak contre leurs collègues mâles. Mais les Etats en guerre gardent un silence complice sur la prostitution de masse organisée par les armées en campagne pour " le repos des guerriers ". Cette lacune va être en partie comblée par un ouvrage de Richard Poulin, professeur de sociologie à l'Université d'Ottawa sur " La mondialisation des industries du sexe " qui paraîtra à l'automne et dont les bonnes feuilles ont déjà été publiées. Si le phénomène est ancien, cette prostitution a pris un caractère d'industrie de masse au cours du dernier siècle et on attend l'historien français qui lèvera le voile sur les activités de l'armée française dans ce domaine.
Richard Poulin cite plusieurs exemples :
Pendant la guerre sino-japonaise (1937-1945) l'armée japonaise d'occupation a utilisé entre 100 000 et 200 000 prostituées coréennes incarcérées dans des bordels de réconfort. Au fur et à mesure de l'extension de la guerre dans le Pacifique de nouvelles recrues chinoises, indonésiennes, malaises, birmanes s'ajoutaient aux coréennes. Considérées comme d'une race inférieure, ces prostituées étaient régulièrement battues et assassinées quand elles tombaient enceintes.
Après la défaite de 1945, le nouveau gouvernement japonais, fort de l'expérience acquise créait à l'intention des troupes d'occupation US (aujourd'hui encore plus de 40000 hommes) " l'association pour la création d'installations récréatives spéciales " qui employa jusqu'à 70000 prostituées japonaises.
La guerre du Vietnam fut l'occasion de mettre sur pied un nouveau système. Les bordels intitulés " Rest and Recreation sites " furent installés en dehors de la zone des combats, enThailande et aux Philippines. Cela résultait d'un accord entre l'armée et US et les gouvernements locaux. Ainsi l'armée US put envoyer en Thaïlande environ 700000 soldats pour, selon l'expression officielle, " se reposer et reprendre des forces " dans les bordels. C'est ainsi que fut lancé sur le marché mondial le tourisme sexuel asiatique de masse qui emploie aujourd'hui en Thaïlande environ 2 millions de personnes dont 300000 enfants.
Plus récemment, c'est l'ex-Yougoslavie qui a vu se développer cette industrie du sexe avec l'arrivée des missions de l'ONU, de l'OTAN, la SFOR en Bosnie, la KFOR au Kosovo et le force de police internationale (IPTF) sans oublier les 400 ONG qui sévissent sur place et dont le personnel compte aussi parmi la clientèle de la prostitution. La nouveauté par rapport aux cas précédents est que dans le chaos qui règne dans l'ex-Yougoslavie, dans l'atmosphère générale de corruption, il existe une étroite imbrication entre le client et le proxénète et que la Bosnie et le Kosovo sont à la fois des lieux d'exercice de la prostitution et des plaques tournantes de la traite des êtres humains.
L'office international des migrations estime à 250 000 le nombre de femmes et d'enfants venus pour la plupart d'Europe de l'Est qui sont victimes de ces trafics. Un des hauts lieux du proxénétisme est l'Arizona Market, zone commerciale ouverte destinée, d'après ses promoteurs, à faire se rencontrer en terrain neutre tous les habitants de Bosnie dans une grande atmosphère de réconciliation commerciale et où les femmes s'achètent dans les boites de nuit entre 1000 et 2000 dollars.

Les multinationales et le pouvoir politique : un livre de John Galbraith
John Galbraith, économiste étasunien de renommée mondiale, qui fut ambassadeur en Inde et conseiller de Kennedy et opposant à la guerre du Vietnam vient de publier en Angleterre un nouveau livre intitulé " The economics of innocent fraud : Truth for our time " (" l'économie de la fraude innocente : vérité de notre temps ")
Il y analyse en particulier l'étroite imbrication entre les directions de s grandes entreprises étasuniennes (en particulier dans le secteur de l'armement) et le gouvernement en montrant que les entreprises ont tellement pénétré au cœur du système politique que celui-ci n'est plus que leur porte-parole et que la politique étrangère des Etats-Unis est en fait celle qui profite le plus aux marchands de canons et pas au pays. Des lecteurs avisés pourront dire " Rien de nouveau depuis Lénine " mais que de tels propos apparaissent sous la plume d'un membre de l'establishment, d'un homme très respecté aux Etats-Unis, est assez nouveau pour être relevé.
Deux citations (traduction COMAGUER) :
"Dans les grandes entreprises modernes, le pouvoir appartient aux managers. Le Conseil d'Administration est une aimable entité totalement subordonnée au pouvoir réel des managers. La relation (ndt : entre le Conseil d'administration et les managers) ressemble à une remise de diplôme à l'Université.Les mythes du pouvoir des actionnaires, les rencontres rituelles avec les managers et l'assemblée générale des actionnaires subsistent mais aucun observateur des grandes entreprises modernes, s'il est doué de raison, ne peut se soustraire à cette réalité. Le pouvoir des grandes entreprises est entre les mains des managers, une bureaucratie qui contrôle elle-même ses tâches et les rétributions qu'elle s'attribue. Les récompenses peuvent confiner au brigandage."
"Nous chérissons les progrés de la civilisation depuis les temps bibliques et même avant. Mais nous devons impérativement faire des réserves.Les Etats-unis et la Grande-Bretagne sont dans les suites difficiles de la guerre en Irak. Nous acceptons la mort programmée pour les jeunes et le meurtre à l'aveuglette pour les hommes et les femmes de tous âges. Il en allait ainsi pendant la première et la seconde guerre mondiale, il en va ainsi en Irak. La vie civilisée, comme on l'appelle, est une grande tour blanche célébrant les réussites de l'humanité. Mais au sommet, il y a en permanence un gros nuage noir .Le progrès humain est dominé par une cruauté inimaginable et par la mort.
La civilisation a fait sur des siècles d'immenses progrès dans les sciences, la santé, les arts et par dessus tout dans le bien être économique. Mais elle a également accordé une position prédominante au développement des armes, à la menace et à la réalité de la guerre. Le meurtre de masse est devenu l'ultime aboutissement de la civilisation.
Les données de la guerre sont incontournables : mort, cruauté aveugle, abandon des valeurs de civilisation, désordres qui en résultent. Les problèmes économiques et sociaux ici décrits (ndt : dans le reste du livre) peuvent être résolus par la pensée et l'action. Ils ont déjà pu l'être. La guerre demeure l'échec humain majeur."

Le monde occidental vu par un ex-dissident soviétique : Alexandre Zinoviev
Alexandre Zinoviev a fait partie des dissidents soviétiques qui dans les deux décennies précédant la chute du système en ont décrit les travers, les tares, les blocages. Passé à l'Ouest les critiques qu'il formulait sur la bureaucratie soviétique lui ont valu d'y être accueilli avec faveur. Mais observateur attentif et sincère il a vite compris que, pas plus que le monde soviétique, le monde occidental réel n'était conforme avec l'image qu'il voulait donner de lui-même. A tel point qu'après son expérience occidentale il a regagné la Russie en 1999. Avant de partir il a publié sous le titre " La grande rupture " une sorte d'état des lieux de la politique de l'Occident dont nous avons extrait quelques phrases qui font écho à la situation des peuples en cours " d'occidentisation " que ce soit en Afghanistan, en Haïti, en Palestine, en Irak ou ailleurs.
L'aspiration des pays occidentaux à soumettre le reste du monde n'est pas seulement le vil projet de certains cercles " impérialistes " au sein de ces pays. Elle est déterminée par les lois objectives de la société. Tout au long de son développement, l'Occident a été obligé d'établir un ordre mondial conforme à ses intérêts.Ce n'est pas seulement qu'il a la possibilité et la force de le faire ; c'est qu'en plus il ne peut plus renoncer à ce projet démesuré.
Au cours de la guerre froide, on a développé une stratégie visant à instaurer un nouvel ordre mondial, à établir une véritable société globale. J'appelle cela " l'occidentisation ".
L'essence de l'occidentisation consiste à imposer aux peuples et aux pays non occidentaux un ordre social, une économie, un système politique, une idéologie, une culture et une manière de vivre qui soient une image (ou une imitation) des modèles occidentaux. L'idéologie et la propagande formulent cela comme une mission humaine, désintéressée et libératrice de l'Occident qui se présente du coup comme le foyer de toutes les vertus imaginables. "Nous sommes libres, riches et heureux, et nous voulons vous aider à devenir aussi libres, riches et heureux que nous." : voilà à peu prés le message que l'idéologie et la propagande occidentales inculquent aux peuples en cours d'occidentisation. "Mais pour cela, vous devez faire chez vous, dans vos pays, ce que nous vous conseillons de faire."

Cela ce sont les paroles. Dans les faits, l'occidentisation (dans le sens qu'on lui donne ici) a pour objectif réel d'amener les victimes désignées dans un état tel qu'elles perdent leurs facultés d'existence et de développement autonomes, de les attirer dans la sphère d'influence et d'exploitation des Etats occidentaux de les rattacher au monde occidental non en tant que partenaires, sur un pied d'égalité, mais en tant que zones de colonisation.
L'occidentisation n'exclut pas le plein assentiment du pays traité, ni l'ardent désir, de la part de ce dernier, de suivre cette voie. L'Occident s'efforce justement de faire en sorte que la victime désignée saute elle-même dans la gueule du loup en lui témoignant en plus sa gratitude. A cet effet, on dispose d'un puissant système de séduction et de préparation idéologique.Mais quelles que soient les circonstances, l'occidentisation reste une opération active de la part de l'Occident n'excluant pas la violence. La bonne volonté du pays voué à l'occidentisation ne signifie pas encore que sa population va accepter à l'unanimité cette nouvelle voie. A l'intérieur du pays concerné une lutte s'instaure entre diverses catégories de citoyens favorables ou opposés à l'occidentisation.
On a également développé une tactique de l'occidebntisation, comprenant des mesures telles que :

"L'occidentisation" du Soudan :
Pour illustrer les propos d'Alexandre Zinoviev, rien de tel que les dernières déclarations de Colin Powell et de Dabeliou Bush sur le Soudan. Le Soudan, immense pays (cinq fois la France), très pauvre, n'est indépendant que depuis 1955 et il est une sorte d'assemblage post colonial instable et hétérogène de ce que nous avons l'habitude d'appeler d'un côté, l'Afrique subsaharienne et de l'autre, l'Afrique du Nord, sans oublier une portion de désert saharien et la vallée du Haut Nil. Après l'indépendance il fut successivement le siège d'un des plus forts partis communistes d'Afrique puis d'un pouvoir islamiste radical. Dans les deux cas, ses orientations politiques ne convenaient pas aux Etats-Unis qui mirent donc leur nez dans ses affaires. Le point d'intervention des Etats-Unis, imités ou imitant en cela Israël, fut le Sud du pays, frontalier de l'Ouganda où vivent des populations en partie animistes en partie christianisées qu'il était facile d'opposer aux arabophones musulmans du centre et du Nord du pays. Le colonisateur anglais avait d'ailleurs, comme à son habitude, favorisé cette opposition. Celle-ci prit la forme d'une rébellion armée du Sud contre le Nord qui dure depuis 1983. Cette guerre civile s'est poursuivie sans susciter d'émotion des leaders occidentaux puisque c'est eux qui l'encourageaient en armant le Sud contre le gouvernement installé au Nord. Une forte odeur de pétrole émane de cette longue guerre civile puisque les ressources pétrolières sont au Sud mais que pour l'exporter il faut passer par le Nord et atteindre la cote de la Mer Rouge. Bien sur, les officiels et les médias serviles s'en sont tenus à la version " ethnico-culturelle " : le sud chrétien et animiste opposé au nord musulman. Ainsi, les rebelles du Sud bénéficient-ils d'un fort courant de sympathie au Congrès Us et chez les chrétiens fondamentalistes étasuniens.Lorsque Clinton fit bombarder Khartoum et détruire, au nom de la lutte contre le terrorisme, une des rares usines pharmaceutiques d'Afrique de l'Est, il ne suscita guère de réaction hostile pas plus dans la classe politique que dans l'opinion publique en général. Symétriquement, essayant de contenir l'influence grandissante des Etats-Unis dans cette partie de l'Afrique, Balladur et son ministre de l'intérieur Pasqua soutenaient le gouvernement islamiste de Khartoum. Celui-ci en échange leur livra Carlos en prélude aux élections de 1995.
Or, le gouvernement de Khartoum ayant assoupli sa position, un accord de partage 50/50 de la manne pétrolière était en passe de se matérialiser entre les rebelles du Sud et le gouvernement du Nord et les multinationales pétrolières US à commencer par CHEVRON/TEXACO allaient pouvoir revenir travailler dans un pays qu'elles avaient fini par abandonner tant il était difficile d'assurer la sécurité des chantiers et installations. Mais les recherches pétrolières que d'autres compagnies concurrentes (chinoises, malaises, françaises...) poursuivaient, bon an mal an, au Darfour à l'Ouest du pays, commençaient à donner des résultats prometteurs. De quoi exciter les appétits d'une nouvelle rébellion régionale qui peut rêver elle aussi d'un partage avantageux de la nouvelle manne pétrolière.L'ampleur et la vigueur des réactions des USA contre cette nouvelle rébellion : voyage sur place de Colin Powell, discours de Bush, et les échos indirects qu'elle suscitent : intervention du pape,prise de position de l'Union Européenne, visite de Michel Barnier démontrent, qu'à l'inverse des rebelles du Sud, ceux de l'Ouest ne sont pas les amis de Washington. La mise en scène tapageuse d'une nouvelle catastrophe humanitaire* est la première étape d'un scénario à la yougoslave. Les troupes US, bien installées à Djibouti et les bombardiers venant du Qatar ou de Diego Gracia ne seront pas cachés bien longtemps par les convois humanitaires.CHEVRON/TEXACO arrivera un peu plus tard ,dans le fourgons de l'armée US.

* Catastrophe humanitaire bien réelle mais quand une catastrophe humanitaire, parmi d'autres hélas, se met soudainement à susciter les larmes de tous les crocodiles du marigot planétaire, c'est que les crocodiles sont en chasse.

L'Australie, chien de garde étasunien dans le Pacifique
Après le retrait d'Irak des soldats d'Espagne, du Honduras et de la République Dominicaine vient d'intervenir celui des Philippins. Cette décision, prise par le gouvernement d'un pays que les Etats-Unis considèrent toujours comme une colonie comme ils l'ont fait de puis un siècle, est une bonne nouvelle. Elle montre que le temps des dictateurs philippins soumis et engraissés par Washington s'éloigne. Mais cette mesure a beaucoup déplu au premier ministre australien réactionnaire John Howard qui sans aucun respect pour l'indépendance de son voisin philippin a manifesté bruyamment son désaccord.
Ce soutien constant et zélé à la politique guerrière des Etats-Unis n'a pas empêché la France de participer ces derniers jours à des manœuvres militaires organisées en Australie par les plus fidèles alliés de Washington dans cette région du monde, à savoir, outre l'Australie : la Thaïlande, reconnue depuis 2003 comme allié stratégique des USA (il s'agit d'un statut accordé par le Congrès qui fait d'un pays non membre de l'OTAN un partenaire militaire privilégié des Etats-Unis en termes de fournitures de matériel et de renseignement) et Singapour.
Ces manœuvres ont entrainé la participation de chasseurs bombardiers français et d'avions ravitailleurs qui ont dû rejoindre le Nord Australie par une très longue route, balisée d'escales dans des pays amis (probablement Djibouti et qui sait Diego Garcia ? mais peu d'informations ont filtré).
Le ministre australien de la Défense s'est réjoui de cette collaboration, qui a été facilitée par des actions aériennes conjointes en Afghanistan où les deux armées de l'air ont appris à se connaître et à intervenir ensemble. Question faussement naïve : l'Australie a-t-elle des projets d'achat d'avions militaires ? Ne pas oublier que Dassault fabrique des chasseurs-bombardiers et qu'Airbus met en vente des avions ravitailleurs destinés à remplacer sur le marché mondial les anciens ravitailleurs fabriqués par Boeing.
Par ailleurs, le gouvernement français manifeste ainsi que, dans la zone des océans indien et Pacifique, il a des intérêts impérialistes à défendre (Réunion, Nouvelle Calédonie, territoires du Pacifique et terres australes, îlot Clipperton inhabité au large de l'Equateur) et que, dans ce cas, il ne craint pas de travailler main dans la main avec les gouvernements les plus dévoués à Bush.
Pour mesurer l'importance de ces intérêts impérialistes, il suffit de se souvenir que les colonies insulaires de la France (Antilles, îles de l'océan indien et îles de l'océan pacifique) permettent à la France, grâce à l'étendue de leurs eaux territoriales, d'être la troisième puissance maritime mondiale en termes de surface d'océan contrôlée.

La Nouvelle Zélande, jalouse de son indépendance
Dans cet espace océanique si convoité, la Nouvelle Zélande occupe une position originale puisqu'elle se veut un défenseur de la liberté des petits Etats insulaires à se gouverner seuls et à ne pas subir les conséquences des activités impériales des états colonisateurs : Etats-Unis et France en particulier. Ainsi pendant toute la période où la France a réalisé ses essais nucléaires dans le Pacifique, La Nouvelle Zélande qui "bénéficiait ", grâce aux vents dominants, de " nos " pollutions radioactives a toujours manifesté une vive opposition à ces essais. Cette opposition avait conduit la Nouvelle Zélande à accueillir le Rainbow Warrior, navire que Greenpeace avait décidé d'envoyer aux abords de Mururoa pour, symboliquement, empêcher la France de " nucléariser " en paix. Le Rainbow Warrior fut plastiqué et coulé dans le port néo zélandais d'Auckland le 10 Juillet 1985. L'opération, réalisée par des agents des services secrets français porteurs de faux papiers néo-zélandais, fit un mort. Laurent Fabius était alors premier ministre.
La Nouvelle Zélande vient à nouveau de servir de refuge à d'autres agents secrets. Le pays est neutre, s'est opposé fermement aux expéditions militaires des Etats-Unis en Afghanistan et en Irak et fait partie du Commonwealth. Autant dire que la détention d'un passeport néo-zélandais permet de circuler sans susciter de méfiance dans tous les pays arabes et de bénéficier via la Grande-Bretagne d'un accès facile au territoire de l'Union européenne. On vient donc d'apprendre que deux citoyen israéliens qui avaient subtilisé ses papiers à un infirme néo-zélandais tétraplégique (qui ne risquait donc pas de courir le monde) ont été arrêtés en Mars et condamnés en Juillet par un tribunal néo-zélandais à quatre mois de prison et à une amende de 32 800 $. Une fois le jugement rendu, Mme Helen Clark, premier ministre en exercice, a officiellement annoncé que, pour elle, il ne faisait aucun doute que les deux hommes étaient deux agents du MOSSAD et elle a fait part de son vif mécontentement au gouvernement israélien. Sharon temporise et a demandé au président de la république israélienne d'aller arrondir les angles sur place. Mais Mme Clark a refusé de le recevoir et demande des excuses officielles.
Ce n'est pas la première fois que le MOSSAD se livre à ce genre d'usurpation d'identité mais les connaisseurs considèrent qu'elle annonce, dans le cadre de la politique jusqu'auboutiste de Sharon, une recrudescence d'assassinats d'opposants politiques à l'étranger. Dans le passé, le MOSSAD a, plusieurs fois, utilisé des faux passeports canadiens pour couvrir ce genre de besogne et pour le Daily Star, quotidien libanais de langue anglaise, l'affaire néo-zélandaise annonce de nouveaux assassinats au Moyen-Orient, le premier de cette nouvelle série pouvant bien être le récent attentat mortel contre un responsable du Hezbollah au sud de Beyrouth.

La mascarade du référendum bolivien
Comme il s'y était engagé pour mettre un terme à l'insurrection populaire du mois d'Octobre 2003, le nouveau président bolivien a organisé un référendum sur la politique pétrolière et gazière du pays. A en croire les grands médias internationaux qui se sont félicité du calme dans lequel s'est déroulée la consultation la politique proposée a été approuvée par la population. La réalité est assez différente. Pour ce qui est de la participation, elle est modeste : 40 % d'absentions, 11% de votes nuls et 12 % de votes blancs. Donc les suffrages valablement exprimés représentent moins de 40 % du corps électoral. C'est peu dans un pays où le vote est obligatoire.
Quand aux questions elles prêtent à sourire. En effet un référendum honnête est normalement destiné à faire approuver solennellement par le peuple tout entier un texte important. Aucun texte n'était proposé au vote des boliviens qui devaient répondre par oui ou par non à pas moins de cinq questions ainsi libellées :

  1. Etes vous d'accord pour que l'actuelle loi sur les hydrocarbures soit modifiée ?
  2. Etes vous d'accord pour que le gouvernement bolivien aient des droits sur les hydrocarbures extrais du sol du pays ?
  3. Etes vous d'accord pour que la société nationale des hydrocarbures (note : qui avait été privatisée par le Président Sanchez de Losada réfugié aux Etats-Unis depuis l'insurrection d'Octobre 2003) soit reconstituée pour contrôler la production des hydrocarbures ?
  4. Etes vous d'accord pour que le gaz bolivien soit utilisé pour que le pays regagne un accès à l'océan ?
  5. Etes-vous d'accord pour que le gaz bolivien soit exporté et pour que les multinationales versent 50% de leurs bénéfices pour avoir le droit d'exploiter le gaz bolivien et pour que le gouvernement investisse pour la santé, l'éducation et les infrastructures ?

Il s'agit d'un référendum mystification et avec des questions pareilles le Président Mesa a carte blanche pour négocier avec les multinationales c'est-à-dire que celles-ci auront juste besoin de sauver les apparences en laissant la moitié d'un bénéfice qu'elles pourront calculer au plus juste la filiale bolivienne vendant au plus juste le gaz à la filiale argentine ou chilienne qui, elle, prélèvera une marge maximum.
Une ultime précision : le président Mesa a précisé pendant la campagne que la nouvelle législation ne s'appliquerait qu'aux nouveaux permis de recherche et d'exploitation. Donc les multinationales (TOTALFINA, BP et REPSOL) qui ont investi avant la nouvelle loi dont le contenu est inconnu ( voir la question 1) peuvent dormir tranquilles et continuer à dire que la Bolivie est un des pays du monde où les taxes sur l'extraction des hydrocarbures sons les plus faibles.
Quant à la question 4, elle flatte un patriotisme revanchard contre le voisin chilien qui à l'issue de la guerre du Pacifique (1879-1881) a privé la Bolivie d'un accès à l'océan et de l'exploitation des nitrates. Peut-être le Président Mesa envisage-t-il une petite guerre pour dépenser les futures recettes pétrolières et pour détourner un mouvement populaire puissant qui, pour sa grande majorité, ne s'est pas fait piéger par le référendum mystificateur et qui dans sa très grande majorité également (un sondage donnait 80% d'opinion favorables) réclame tout simplement ce qui n'était pas envisagé par le référendum, à savoir : la nationalisation des hydrocarbures. C'est d'ailleurs ce qui figurait sur la plupart des bulletins nuls.
Prochaine étape de la confrontation : l'élection d'une assemblée constituante promise elle aussi en Octobre 2003.

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