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Bulletin 117

Semaine 04- 2005

 

Amérique latine : petit lexique pour commencer
ALBA : Proposée par le Venezuela dès 2001, l’ALTERNATIVE BOLIVARIENNE POUR L’AMÉRIQUE a été défendue par CHAVEZ face à BUSH au sommet de Monterrey en 2004.Dans ce cadre général a été signé en Décembre 2004 un accord de mise en application des principes de l’ALBA entre Cuba et le Venezuela (voir annexe). Noter le jeu de mot : en espagnol ALBA, c’est l’aube, pleine de promesses !
ALCA : Area de Libre Comercio de las Americas – en français ZLEA (zone de libre-échange des Amériques) en anglais FTAA - destinée à devenir l’extension à la totalité du continent de l’ALENA. Ce projet lancé en 1994 et poussé avec acharnement par les Etats-Unis tarde à se réaliser et suscite dans toute l’Amérique Latine des oppositions populaires très fortes et organisées. Le traité organisant cette zone de libre-échange devait être signé en 2004 au « sommet des Amériques » de Monterrey, il ne l’a pas été.
ALENA : Accord de Libre Echange Nord Américain (en anglais NAFTA) conclu entre la Canada, les Etats-Unis et le Mexique et mis en application le 01.01.1994.
Supprime tous les droits de douane et organise la libre circulation des marchandises et des capitaux entre les trois Etats. En revanche, pas de libre circulation des personnes et pas de politique économique commune.
APEC : ASIA-PACIFIC ECONOMIC COOPERATION
Ce groupement intergouvernemental est unique en son genre en ce sens qu’y adhérer n’entraîne aucune obligation pour aucun de ses membres. Il s’agit d’un forum où l’on débat librement des échanges commerciaux, de la coopération et du développement des Etats membres avec un seul objectif très consensuel affiché : favoriser la croissance économique et la prospérité de la région.
Il compte 21 membres : Australie, Brunei, Canada, Chili, Chine, Hong-Kong, Indonésie, Japon, Corée du Sud, Malaisie, Mexique, Nouvelle Zélande, Papouasie Nouvelle Guinée, Pérou, Philippines, Russie, Singapour, Taiwan, Thaïlande, USA, Vietnam.
Créé en 1989 à l’initiative des USA, il était la réponse immédiate à la fin de la guerre froide et élargissait sous la bannière de la croissance de l’économie et des échanges le cercle des amis des USA jusqu’alors limité au Japon et aux dragons asiatiques : Corée du Sud, Taiwan, Hong-Kong, Singapour, qui avaient assuré l’encerclement stratégique et militaire du monde communiste et principalement de l’URSS. Seuls la Corée du Nord, le Cambodge, l’Equateur et la Colombie n’y étaient pas invités.
Chaque année, l’APEC réunit les chefs des états membres au cours d’un sommet où selon la formule diplomatique ils échangent leurs vues sur la situation économique d’une grande région qui compte 2,6 milliards d’habitants et représente 40% du PIB mondial.
G 20 : Il regroupe les pays suivants : Afrique du Sud, Argentine, Bolivie, Brésil, Chine, Cuba, Egypte, Guatemala, Inde, Indonésie, Mexique, Nigeria, Pakistan, Paraguay, Philippines, Tanzanie, Thaïlande, Venezuela et Zimbabwe soit 3,5 milliards d’habitants sur un total de 6 et 70 % de la population agricole mondiale.
MAQUILADORAS : usines d’assemblages délocalisés des USA vers le Mexique pour bénéficier de l’écart de salaire entre les deux pays. Procédé mis en place avant le démarrage de l’ALENA mais puissamment intensifié par le libre échange. Installées dans la partie Nord du Mexique pour minimiser les frais de transport, elles sont souvent propriété de grandes multinationales. Après des années de croissance folle, ces mêmes multinationales toujours à la recherche de salariés moins chers et plus dociles ont tendance à quitter le Mexique. Destination la plus à la mode : la Chine.
MERCOSUR : marché commun sud américain entre l’ARGENTINE, LE BRÉSIL, le paraguay, l’Uruguay.
Organisé par le traité d’Asunción (26 mars 1991) il prévoit, outre la libération des échanges, une coordination des politiques économiques des états membres et constitue donc une amorce d’intégration régionale très différente d’un simple traité de libre-échange. La libération des échanges a d’ores et déjà une forte augmentation du commerce intérieure à la zone. Il reste aux gouvernements actuels, qui commencent à s’exprimer d’une seule voix dans les négociations internationales, à donner plus de corps à des politiques économiques communes.
OEA : Organisation des Etats Américains (par charité, on n’utilisera pas l’acronyme anglais : OAS)
Créée en 1948 cette organisation a regroupé initialement les états indépendants du continent – à l’exception du Canada qui n’a adhéré qu’en 1990 – et ensuite les anciennes colonies anglaises des Caraïbes quand elles sont devenues indépendantes. Les objectifs de l’OEA, très inspirés de l’idéologie étasunienne et fixés dans sa charte, mélangent discours sur les droits de l’homme et sur la suppression des barrières douanières dans cette espèce d’égalité idéologique factice entre la liberté de la personne et la liberté du capital. Cuba a été exclu de l’OEA en 1962.
SOA : l’Ecole des Amériques (School Of the Americas) est la pure contradiction des objectifs de défense des droits de l’homme figurant dans la charte de l’OEA. Cette école ouverte par les Etats-Unis en 1947 à Panama a formé tous les personnels militaires – 56 000 personnes au total *– ayant contribué à la défaite des mouvements ou régimes progressistes dans tous les pays d’Amérique Latine. Ces personnels appartenant aux armées officielles et aux services de renseignement ont été formés à toutes les techniques de contre-insurrection, aux assassinats politiques, à la torture et à toutes les formes de déstabilisation. Ils constituent autant d’agents de la domination politique des Etats-Unis sur le continent.
La SOA a été repliée aux Etats-Unis sur Fort-Benning (Georgie) où, malgré une opposition organisée de citoyens des USA et des réserves de quelques élus au Congrès, elle continue son activité sous le nom de WESTERN HEMISPHERE FOR SECURITY COOPERATION.

* la liste est consultable sur le site du Réseau Voltaire

L’Amérique latine ne veut plus être une arrière-cour
L’année 2004 a été marquée par une évolution très sensible de la situation politique de l’Amérique du Sud. Evolutions électorales d’abord puisque après le succès de Chavez dans le référendum d’Août, les élections législatives ont porté une équipe de gauche au pouvoir en Uruguay. En même temps les gouvernements d’Argentine, de Bolivie, d’Equateur sont contraints par la force des mouvements populaires à adopter des attitudes plus fermes face aux exigences financières des banquiers publics (FMI) ou privés et des multinationales de diverses origines ( étasuniennes bien sûr, mais aussi espagnoles et françaises).Même si la politique intérieure du gouvernement brésilien déçoit les soutiens de gauche à Lula, même si les socialistes chiliens restent très néolibéraux force est de constater qu’à part la Colombie devenue le foyer régional de la réaction, aucun des pays du continent Sud n’obéit plus au doigt et à l’œil à Washington, ce qui est une situation radicalement nouvelle.
Il se crée une dynamique politique continentale d’opposition au monde unipolaire voulu par BUSH et mis en oeuvre de la façon la plus barbare en Irak. Cette opposition n’est certes pas assez forte pour s’opposer frontalement et soudainement à la mondialisation capitaliste et pour rejeter totalement le fardeau de la dette, mais elle s’est manifestée par une série d’initiatives ou d’évènements qui tous vont dans le sens d’un monde polycentrique et d’un affaiblissement de l’hégémonie US. Parmi eux :

  1. La défaite de la droite vénézuelienne au référendum d’Août sur la destitution de CHAVEZ et confirmée aux élections régionales est l’échec d’une nouvelle tentative pour arrêter la « révolution bolivarienne ». CHAVEZ, conforté, poursuit son avancée en lançant une réforme agraire qui bien que progressive fait hurler la finance internationale à la fois pour ses effets pratiques locaux et pour son caractère exemplaire pour tous les indiens du continent. La droite vénézuelienne et ses amis de l’étranger, privés désormais de moyens légaux (grèves et référendum) en sont réduits aux coups tordus comme l’enlèvement d’un dirigeant des FARC colombiennes en plein centre de Caracas. Les Etats-Unis sont donc là sur la défensive (ce qui ne veut pas dire qu’ils sont moins dangereux).
  2. L’opposition populaire à l’ALCA en même temps que le bilan négatif de l’ALENA pour le Mexique conduit les dirigeants d’Amérique du Sud à renforcer les solidarités régionales, ce qui veut dire maintenir et renforcer le Mercosur et créer le cadre d’une alliance politique subcontinentale. C’est ce qui a eu lieu au Pérou au mois de Décembre 2004. Les douze chefs d’Etat d’Amérique du Sud ou leurs représentants ont décidé, par la Déclaration de Cuzco, de créer La Communauté Sud-américaine des Nations CSN. Cette déclaration ouvre la porte à une démarche d’intégration continentale plus inspirée de l’Union Européenne que de l’ALENA.
    Elle en peut qu’être mal reçue aux Etats-Unis qui essaieront de fissurer ce bloc avant qu’il ne se consolide. Ils le feront en s’appuyant sur les moins déterminés de ses signataires.
    Bien sûr, tous les gouvernements ne sont pas également motivés : certains impulsent le mouvement : Venezuela en tête et Brésil, d’autres suivent : Pérou, Equateur, Chili mais aucun ne peut accepter la poursuite des énormes dégâts engendrés par 20 ans (30 ans au Chili) de politique néolibérale imposée par le gang de Washington (gouvernement + Réserve fédérale (FED) + FMI + Banque mondiale). De ce point de vue les leçons de l’expérience mexicaine de dix ans d’intégration à l’économie US par le biais de l’ALENA sont claires : destruction de l’agriculture nationale par les importations de produits US lourdement subventionnés ( que le Mexique, patrie du maïs, en soit réduit à importer du maïs US pour son alimentation quotidienne est un symbole douloureux) industrie de la sous-traitance qui crée des emplois de misère et surtout dans les régions proches de la frontière, captation du pétrole mexicain par les USA (même s’il reste produit par la société nationale PEMEX nationalisée par Lazaro Cardenas en 1938).
  3. Refus de s’enrôler dans la guerre contre le terrorisme à la sauce US :
    C’est ce qui est clairement ressorti de la réunion des ministres de la Défense des Amériques tenue à Quito du 16 au 21 Novembre 2004. Cette réunion est se tient régulièrement dans le cadre et du Traite Interaméricain d’Assistance réciproque (TIAR) et de la Junte Interaméricaine de Défense (JID) mis en place par l’OEA.
    Au cours de cette réunion, RUMSFELD qui voulait entraîner tous ses partenaires dans sa « guerre contre le terrorisme » a essuyé un camouflet, les états « latinos » ayant répondu que le terrorisme avait dans chaque pays une forme particulière et qu’il appartenait à chaque Etat de le combattre chez lui. Cette position était motivée par un sous-entendu de taille : l’Histoire a appris à tous les états latino-américains que le terrorisme peut aussi être suscité par la puissance qui prétend le combattre, c’est même le cas le plus fréquent. Heureusement au Chili, comme en Argentine, en Uruguay et au Paraguay et dans le reste du continent il est impossible d’effacer cette leçon tragique de l’Histoire récente, d’ignorer KISSINGER, le plan Condor, les assassinats politiques et le soutien sans faille des USA aux tortionnaires.
  4. Les nouvelles alliances internationales :
    Ne se laissant plus enfermer dans le seul face à face historique avec les USA les pays d’Amérique du Sud s’inscrivent dans de nouvelles alliances internationales. La première manifestation a été leur participation au G 20 qui pour la première fois, à l’occasion des négociations de l’OC sur les a rassemblé des pays du Sud opposés aux pays du Nord sur la question des subventions aux exportations agricoles. Prenant les « libéraux » en flagrant délit d’interventionnisme étatique, le G 20 veut éviter que les marchés des ses pays membres soient envahis par des produits agricoles subventionnés par les USA ou l’Union Européenne. Face à cette résistance nouvelle, les USA ne sont pas prêts à abandonner leur position dominante dans les exportations mondiales de céréales. L’Union Européenne plus souple dans son attitude et moins unitaire (car les grands exportateurs de produits agricoles – France en tête - y sont minoritaires) a de son côté admis que la question méritait d’être étudiée. C’est à la lumière de cette offensive du G20 qu’il faut interpréter le choix de Robert ZOELLICK comme adjoint direct de CONDOLEEZA RICE dans la nouvelle administration BUSH. ZOELLICK n’est pas un ami des européens, expression que n’a aucun sens dans ces conflits stratégiques. ZOELLICK va essayer de faire bloc avec l’UE face au G 20.
  5. L’entrée en scène de la Chine :
    Non contente de bouleverser tous les marchés internationaux de matières premières par ses achats à court terme, la Chine prépare l’avenir et elle cherche à passer des accords commerciaux entre Etats qui mêlent commerce et coopération associant des achats de matières premières, des projets industriels communs et des échanges technologiques. A l’issue du sommet de l’APEC où il a tenu la vedette au détriment de BUSH accueilli par des manifestations de protestation Le président chinois a donc visité quatre pays d’Amérique du Sud : l’Argentine, le Brésil, le Venezuela et Cuba et a reçu CHAVEZ à Pékin quelques semaines plus tard.
    Ainsi la Chine va acheter du minerai de fer au Brésil (premier producteur mondial) mais va en même temps investir dans des projets sidérurgiques communs au Brésil, de la même façon elle achètera du pétrole au Venezuela qui diminuera ainsi sa dépendance par rapport à ses clients US et participera à des projets d’usines pétrochimiques au Venezuela, et il en ira de même avec Cuba pour le Nickel : la Chine déjà premier producteur mondial d’acier a besoin de nickel pour ses aciéries mais en même temps elle construira avec les cubains des usines qui permettront à Cuba de valoriser sa matière première et de mettre sur le marché des produits à plus forte valeur ajoutée.
    Il s’organise ainsi des complémentarités entre pays émergents et le monde sort de sa division simpliste entre pays développés et pays en voie de développement, les uns ordonnant les autres subissant. Cette évolution est en contradiction fondamentale avec l’unilatéralisme des USA dont les moyens de domination vont de plus en plus se limiter à la barbarie militaire.
  6. Cuba sort de l’isolement :
    Relations économiques plus intenses avec la Chine, dédollarisation, relations de plus en plus fraternelles avec le Venezuela et avec les autres pays du sud continent Cuba, avec la crise commencée de la domination US, voit s’entrouvrir les portes du pénitencier politique dans lequel Washington a voulu l’enfermer depuis 45 ans.

Ukraine : incertitudes
Alors que YUSCHENKO vient seulement de commencer officiellement son mandat, sa coalition est déjà menacée d’éclatement. L’assemblage hétéroclite de forces politiques qui a soutenu sa candidature à la Présidence de la République est déjà menacé de se défaire au moment où il doit constituer son gouvernement.
Les grands médias occidentaux sont très discrets là-dessus et ne veulent voir que le triomphe de leur candidat. Ils soulignent tous que son adversaire avait les faveurs de la Russie mais feignent d’ignorer l’appui politique, diplomatique et financier massif et prolongé apporté à YUSCHENKO tant par les Etats-Unis que par l’Union Européenne et ses membres les plus inféodés à Washington : Pologne, Lituanie, sans oublier le Vatican. (Voir nos précédents bulletins).
Qu’en est-il sur le terrain ? Le parti socialiste pourtant résolument pro-occidental et qui a soutenu YUSCHENKO propose le vote d’une loi accordant à la langue russe le statut de seconde langue officielle à égalité avec l’ukrainien. Il heurte ainsi de front l’aile nationaliste de la coalition mais fait une démarche qui s’oppose à l’éclatement du pays.
D’un autre côté, la milliardaire ultra-libérale et futur premier Ministre TIMOSHENKO veut faire annuler les modifications apportées à la Constitution qui ont été votées à une large majorité par le Parlement en Décembre 2004 et revenir à un régime présidentiel. Elle reconnaît ainsi implicitement que la victoire de son candidat a été une victoire à la Pyrrhus. YUSCHENKO de son côté voudrait calmer ceux qui ont tenu la rue à Kiev pendant plusieurs semaines et veulent maintenir la pression. Il devra en particulier se défier des courants et organisations antisémites qui restent actifs dans l’Ouest du pays. (ne pas oublier que dans ces régions dont la population juive fut décimée par l’occupant nazi avant même la mise en œuvre de la solution finale industrielle (Treblinka, Auschwitz), l’armée du Reich a pu recruter de nombreux soldats ).
Ainsi, une fois passée l’effervescence de la campagne de « marketing orange » la réalité reprend ses droits. Elu à l’issue d’une campagne de promotion publicitaire mondiale YUSCHENKO, qui n’a pas rallié l’est du pays où les suffrages au 3° tour des présidentielles sont allés à plus de 90 % à son adversaire, qui n’a pas de majorité parlementaire, dont la majorité gouvernementale est incertaine pour ne pas dire incohérente,qui n’a pas de programme à part de claironner que l’Ukraine veut rentrer dans l’Union européenne ( ce qui au rythme où se font les adhésions peut prendre entre 10 et 20 ans à partir du moment où l’Union lui ouvrirait la porte, ce qui n’est même pas aujourd’hui le cas). Mais en proclamant cet objectif, YUSCHENKO rejette implicitement le projet de marché commun : Russie, Belarus, Kazakhstan Ukraine que son prédécesseur avait approuvé début 2004.
En fait, pour les sponsors de YUSCHENKO la seule question à régler d’urgence est celle de l’adhésion à l’OTAN. Le sort des ukrainiens est le cadet de leur souci et pour Washington, c’est désormais officiel, le prochain gouvernement à déstabiliser dans la région est celui du pays voisin : le Belarus qui n’a demandé à adhérer ni à l’OTAN ni à l’Union européenne. Ca mérite bien une raclée !
Quant à la MOLDAVIE, elle aussi mitoyenne elle est certainement promise à une campagne « ORANGE » à l’occasion des élections législatives du printemps prochain : le nouveau duel médiatique opposera le « bleu » SERAFIM URECHEANU à « l’orange » YOURI ROCHCA . A vos écrans ! On prend les paris !
Les lecteurs attentifs de la presse auront remarqué qu’en accueillant YUSCHENKO à Moscou, POUTINE a souligné que la Russie ne soutenait pas de partis d’opposition dans les pays voisins, histoire de rappeler que lorsqu’il s’est rendu en Ukraine avant les élections présidentielles c’était à l’invitation du premier ministre en exercice : VIKTOR YANUKOVICH.

Poker menteur en Syrie
La Syrie va-t-elle acheter des missiles à la Russie ? Cette question agite le gouvernement israélien et le Pentagone. Le missile en question est un développement du SCUD bien connu, de portée moyenne – autour de 300 kilomètres - mais suffisante pour atteindre Israël et peut-être même le désert du Néguev où sont fabriquées les armes nucléaires israéliennes. Ce missile serait doté des derniers perfectionnements en matière de brouillage électronique et pourrait donc assez difficilement être intercepté. Israël tempête en affirmant que ces missiles vont tomber entre les mains des terroristes (le Hezbollah libanais, qu’ils ne citent pas, est évidemment visé). La Syrie se refuse à officialiser, la Russie, sans confirmer ni infirmer fait valoir qu’il n’existe aucune interdiction de vente de ce type d’armement et dépêche quand même à Tel Aviv son vice ministre des affaires étrangères pour des explications.
On n’en sait guère plus pour l’instant mais il est probable que ce projet est destiné à faire réfléchir ceux qui à Washington et à Tel Aviv veulent sans plus tarder détruire les installations nucléaires de l’Iran. Nouvel épisode de la néo-guerre froide.

Les nouveaux ennemis :
Outre CUBA, déjà considéré comme une simple colonie des USA en 1903 ce que démontre à l’envie cette déclaration de Théodore ROOSEVELT alors président des Etats-Unis : « Je suis tellement fâché contre cette infernale petite république que j’aimerais qu’elle soit rayée de la carte. », on retrouve les ennemis déjà déclarés : Corée du Nord et Iran et il s’y ajoute quelques nouveaux.
Le Myanmar (ex Birmanie) dont la junte militaire était tolérée par Washington tant que le pays contrôlait le triangle d’or de la production d’opium mais qui perd de son intérêt dés l’instant où les intérêts US sont bien défendus par la CIA et les forces spéciales US dans un l’Afghanistan est redevenu de très loin le premier producteur mondial, le Zimbabwe et le Belarus.
Ces trois nouveaux ennemis officiels ont deux points communs :
L’un, souligné à grand bruit par Washington, est qu’ils sont gouvernés par des régimes autoritaires.
L’autre, qui ne l’est pas, c’est que ce sont des pays petits, faibles, peu peuplés, ce qui a fait dire aux théoriciens US de la domination comme ZBIGNIEW BRZEZINSKI que l’administration BUSH manquait d’ambition et que les vrais adversaires restaient la Russie et la Chine. Il en serait presque à accuser BUSH d’être un « tigre de papier ».

Annexe :
vous trouverez le texte de l' "Accord entre le président de la République bolivarienne du Venezuela et le président du Conseil d’État de Cuba pour l’application de l’Alternative bolivarienne pour les Amériques" à l'adresse suivante : http://granmai.cubaweb.com/frances/2004/diciembre/mier15/51acuerdo.html

A propos des élections en Irak : un point de vue canadien
Texte de la déclaration signée par plus de 70 personnalités du Québec et par L'aut' journal, Avocats contre la guerre (LAW), Centre de recherche sur la mondialisation (CRM), Collectif échec à la guerre, l'Entraide missionnaire, Option citoyenne, Union des forces progressistes (UFP), l'Union paysanne. Un extrait de ce texte fut publié  dans La Presse , Montréal, 25 janvier 2005
www.globalresearch.ca 25 janvier 2005

Elections irakiennes sous occupation: Le Canada complice d'une mascarade démocratique
Comment tenir des élections libres et justes lorsque la majorité des candidats ne sont même pas en mesure de faire campagne? Lorsque des populations entières ne peuvent participer au vote? Lorsque l’élection elle-même sert d’abord et avant tout un «agenda» américain de mainmise sur toute une région du globe?
Les élections prévues le 30 janvier en Irak-- s'il est même possible de les tenir dans les conditions actuelles d'occupation militaire américaine, de violence, et dans le contexte d'un boycott important par la communauté sunnite-- ne visent qu'à légitimer l'occupation militaire états-unienne, et à justifier l'invasion de l'Irak par les États-unis sans l'autorisation du Conseil de sécurité des Nations unies.
Le Canada, même s'il n'a pas participé à la coalition des envahisseurs états-uniens, prête aujourd'hui, par son soutien au "processus électoral" (qui n'est ni "indépendant", ni l'expression d'une quelconque véritable souveraineté irakienne), main-forte à l'entreprise de légitimation de cette guerre qu'on a tenté de justifier par tant de prétextes, voire de désinformation et de mensonges. Le Canada accepte ainsi d'être complice d’un agenda bien précis et d'une campagne de relations publiques pour rehausser l'image de l'administration Bush en Irak, qui malgré un transfert (plutôt factice) de souveraineté à une institution "intérimaire", maintient néanmoins des effectifs de 150 000 soldats dans ce pays prétendument "souverain".
En effet, après que le Premier ministre Martin ait offert une contribution canadienne au Président Bush en avril dernier, et après la rencontre Bush-Martin du début décembre, le Canada était l'hôte, les 19 et 20 décembre derniers, du "Forum 04", une conférence à huis clos dite "internationale" portant sur les élections irakiennes. Le forum a accouché de la Mission internationale sur les élections en Irak, dont Élections Canada assurera le Secrétariat. Tous les pays impliqués dans la mission d'observation sont ou ont été membres de la coalition américaine, à l'exception du Canada, du Mexique et du Yémen.
L'implication canadienne en Irak n'aura rien à voir avec la démocratie ou la promotion des droits de la personne. Elle vise, au contraire, à légitimer, en Irak, les structures imposées par l'occupation militaire américaine, et ce en toute connaissance de cause. Jean-Pierre Kingsley, Directeur général d'élections Canada, décrit ainsi la fonction des missions d'observations électorales: "La participation d'acteurs internationaux auprès d'un pays en voie de démocratisation ou qui souhaite consolider ses assises démocratiques joue un rôle fondamental de légitimation à plusieurs niveaux." Si selon Kingsley, le rôle fondamental est de légitimer, dans le cas de l'Irak, ce qui doit être légitimé, et justifié, c'est l'invasion et l'occupation meurtrières dont le pays a été victime! Ainsi, l'Irak "gagne" en démocratie ce qu'il a perdu en vies humaines, (100 000 selon la revue The Lancet) en infrastructures (à être rebâties à coup de millions par des entreprises américaines) et en respect de la souveraineté de son territoire, ou de ce qu'il en restait. De plus, selon Kingsley, une participation à une mission d'observation constitue une reconnaissance de la validité d'un processus électoral en place, et sert à communiquer ce message de "reconnaissance":
"Autrement dit, accepter une mission électorale, c'est reconnaître à prime abord que l'exercice électoral est légitime, que les éléments essentiels sont présents et que les objectifs sont réalisables. Ce message de reconnaissance joue aussi bien sur la scène internationale que nationale, c'est-à-dire auprès des intervenants locaux."
L’exercice électoral est illégitime parce qu’il sert des objectifs principalement américains, et des objectifs véritablement démocratiques sont irréalisables dans un contexte d’insécurité qui empêche les populations de plusieurs régions , en Irak, d’aller voter. De plus, il est inacceptable de "légitimer" une invasion et une occupation violant les principes fondamentaux établis, il y a un demi-siècle, par le Tribunal de Nuremberg qui qualifiait l'agression de "crime suprême" en ces termes:
"L'agression est le crime de guerre suprême. Il se distingue des autres crimes de guerre seulement en ce qu'il contient en lui le mal accumulé de tous les autres".
Et quant aux autres crimes de guerre dont " l'accession à la démocratie" servirait d'alibi avec la complicité d'Élections Canada, et de son partenaire dans la mission d'observation, l'International Foundation for Electoral Systems, ils sont parmi les plus graves aux yeux du droit international. Ce n’est pas un hasard si L’IFES, qualifiée par Élections Canada de "non partisane" et "indépendante" et qui tire son financement et son mandat du gouvernement américain, par le truchement de USAID.
L'invasion de l'Irak par les États-Unis constitue en premier lieu une violation de la Charte des Nations unies, qui interdit formellement aux états de recourir à la force dans le règlement de leurs différends. L'occupation de l'Irak s'est illustrée par des violations importantes des Conventions de Genève sur le traitement de la population civile, et de la Convention contre la torture à la prison d'Abu Ghraib. Les irakiens font l'objet de violations massives de leurs droits au quotidien. L'occupation américaine n'assure aucunement la sécurité d'une population civile terrifiée.
Le Canada n'a aucun mandat qui lui permette de légitimer, de quelque manière que ce soit, ces crimes et ces violations des droits de la personne en Irak. Encore moins en engageant le Canada dans une entreprise de faire-valoir pour une guerre américaine illégale et illégitime. Et comme, de l’avis de Kingsley, les missions d'observation sont de puissants outils de légitimation, il n'est pas toujours opportun, selon lui, d'y participer:
" Cette fonction de légitimation ne saurait cependant être inconditionnelle. Ainsi, lorsque les conditions essentielles à la démocratie ne sont pas présentes, en commençant par la tenue d'élections libres et justes, on devrait refuser de participer à une mission ou encore s'en retirer lorsque ces conditions ne sont plus rencontrées."
Comment tenir des élections libres et justes lorsque la majorité des candidats ne sont même pas en mesure de faire campagne? Lorsque des populations entières ne peuvent participer au vote, alors qu'ìl est beaucoup plus facile de le faire pour la diaspora irakienne à l`étranger, une forme d'élections "à deux vitesses"? Lorsque l’élection elle-même sert d’abord et avant tout un «agenda» américain de mainmise sur toute une région du globe? Il ne saurait y avoir un exemple plus éloquent d'une mission pour laquelle "les conditions essentielles à la démocratie ne sont pas présentes" que la Mission internationale sur les élections en Irak. Ni un exemple plus éloquent d'une politique étrangère canadienne qui ne sert en rien les intérêts de la vaste majorité de la population du Canada et du Québec.

Le texte fut rédigé par Tiphaine Dickson, avocate spécialisée en droit international, en collaboration avec le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM).

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