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Bulletin 71

Semaine 39- 2003

Bush-Ben Laden : le duo infernal continue
Acte I : Bush demande au Congrès une rallonge de 87 milliards de dollars pour poursuivre sa " guerre contre le terrorisme "

Acte II : Trois jours après Ben Laden fait diffuser une interview où il annonce de nouveaux actes terroristes

Acte III ( encore à venir) : le Congrès, impressionné par les déclarations de Ben Laden, vote les 87 milliards de dollars sans discussion

Merci Ben Laden !

Nb : 87 milliards de dollars c'est environ la moitié du PIB du Portugal ou 5 fois le budget de l'éducation nationale en France

Anniversaires
Impossible d'échapper aux commémorations du 11 septembre2001mais les difficultés rencontrées par l'armée US tant en Irak qu'en Afghanistan ont suscité une certaine modération des médias tant aux Etats-Unis qu'à l'extérieur

Au point que beaucoup ont redécouvert le coup d'état militaire du 11 Septembre 1973 au Chili où l'armée a, avec l'appui politique et logistique des Etats-Unis, renversé le gouvernement d'Unité Populaire et installé pour 20 ans une dictature sanglante et un ultralibéralisme économique brutal qui a été, avant le reaganisme et le thatchérisme, la première mise en application pratique des théories économiques de l'école de Chicago.

Mais ce rappel du coup d'Etat au Chili ne doit pas faire oublier la faiblesse des réactions internationales à l'époque. Cette passivité traduisait l'acceptation du fait que l'Amérique Latine était considérée comme la chasse gardée de l'impérialisme étasunien et que rien ne pouvait être tenté en réaction à un coup d'Etat dans ce continent. L'URSS en particulier ne voulait pas revivre une crise analogue à celle des fusées de Cuba en 1962.

Aujourd'hui la résistance populaire à l'appropriation économique de l'Amérique Latine par les Etats-Unis existe et les coups d'etat fomentés par les Etats-Unis peuvent échouer comme ce fut le cas au Venezuela l'année dernière.

Mais à ce jeu des anniversaires politiques, d'autres commémorations sont également dignes d'intérêt

Le 12 Septembre 1980 - voici 23 ans - l'armée turque renversait le gouvernement civil élu et promulguait le jour même une constitution, toujours en vigueur, qui place au dessus du pouvoir civil, gouvernement et parlement, un Conseil National de Sécurité où les militaires dominent. Depuis l'armée a donc rendu le pouvoir aux civils mais elle peut, à tout moment, remettre en question la politique du gouvernement voire, comme ce fut le cas en 1997, le pousser à démissionner sous menace de putsch.

La démocratie turque est donc une démocratie bottée et casquée où l'opposition politique est une activité périlleuse que ce soit au Kurdistan ou dans le reste du pays. Qu'on en juge : 600000 personnes emprisonnées, torturées, pour raisons politiques,des centaines de ces prisonniers morts à l'issue de grèves de la faim pour protester contre les conditions inhumaines de détention, 30000 exilés politiques...

Autre anniversaire, celui de la création des deux Corées, voici 55 ans, le 15 août 1948 celle du Sud , le 18 Septembre celle du Nord.

Après 35 années d'une occupation japonaise très brutale, la Corée se trouve libérée en 1945 mais un peu comme l'Allemagne, elle se trouve occupée par deux armées : celle de l'URSS au Nord, celle des Etats-Unis au Sud. L'aspiration populaire à l'indépendance et à l'unité nationale est foret, mais la guerre froide va en décider autrement et consacrer la division du pays en deux Etats hostiles. La Corée du Nord tente par la force l'unification à son avantage et envahit le Sud le 25 Juin 1950. Les Etats-Unis obtiennent l'accord de l'ONU- l'URSS s'abstenant- et interviennent militairement pour sauver le Sud. . La Chine, où le Parti Communiste vient d'accéder au pouvoir défend le Nord et va éviter son écrasement. Le général Mac Arthur commandant les forces étasuniennes demandera le bombardement atomique de la Chine, mais la Présidence (Eisenhower) s'y opposera.

Après trois ans de combats très meurtriers, la frontière sera stabilisée là où elle avait été fixée en 1948. Conformément aux accords d'armistice, les alliés de la Corée du Nord se retireront rapidement du pays. Par contre, les Etats-Unis n'ont jamais quitté la Corée du Sud et y maintiennent une énorme armée de 38000 hommes qui jusqu'au début des années 90 disposait sur place d'armes nucléaires pointées sur le Nord. Le résultat de cette menace militaire constante est sans surprise. La défense est devenue la première priorité du régime nord-coréen qui place sa survie avant le bien-être de la population et qui cherche donc à développer un programme d'armement nucléaire. Le pays disposerait aujourd'hui de quelques bombes et surtout des missiles capables de les transporter.

Mais contrairement à ce qu'affirme l'équipe Bush, la Corée du Nord qui comme la Corée du Sud n'a jamais abandonné l'espoir de la réunification et de l'indépendance du pays, ne veut pas faire la guerre, elle veut obtenir des Etats-Unis dont l'armée campe à sa porte, un traité écrit de non-agression. Cette exigence très compréhensible est une demande qui heurte et scandalise à Washington où le droit d'agresser, considéré comme l'extension naturelle de la conquête de l'Ouest, est un dogme.

Dernier anniversaire, il y a 50 ans, le 19 août 1953 en Iran. Ce jour là, un coup d'état, fomenté par la CIA, renverse le régime parlementaire dirigé par le Docteur Mossadegh et le remplace par le Shah. Le Docteur Mossadegh, bourgeois nationaliste, considérait que les sociétés pétrolières étrangères qui exploitaient le pétrole iranien depuis le début du siècle (en particulier l'Anglo-Iranian Oil Company) ne laissaient à l'Iran que les miettes du festin pétrolier et il avait donc décidé à son arrivée au pouvoir en 1951 de nationaliser le pétrole. Le pays fut d'abord soumis à un boycott des fournisseurs occidentaux de matériel pétrolier, la production baissa et Mossadegh demanda alors un soutien technique à l'URSS voisine. C'en était trop. Les Etats-Unis firent tomber Mossadegh, installèrent à la tête du pays le Shah qui allait gouverner d'une main de fer de 1953 à 1979 en s'appuyant sur une des polices politiques (la SAVAK) parmi les plus féroces de la planète. Toute l'habileté de Khomeiny fut de capter à son profit la haine des Etats-Unis qu'avait suscité le régime qu'ils avaient installé et soutenu d'un bout à l'autre.

Onze Septembre : les langues se délient
Pour de nombreux observateurs, comme pour COMAGUER, le déroulement des évènements du 11 Septembre 2001 était étranges à divers titres. Pour nous le véritable respect des victimes des attentats impose l'établissement de la vérité. A ce titre il intéressant de constater que des membres de la classe dirigeante se posent aujourd'hui publiquement des questions que beaucoup se sont posées en 2001.

Tel est le cas de Michael Maecher, Ministre de l'environnement du gouvernement Blair depuis 1999 qui a démissionné de son poste début 2003 en raison de son désaccord avec l'invasion de l'Irak.

Il a livré le 6 Septembre son opinion dans le quotidien britannique Guardian. Pour lui, la guerre contre l'Irak était programmée avant le 11 Septembre 2001 et figurait explicitement dans un document établi par Dick Cheney, Donald Rumsfeld, Paul Wolfowitz , Jeb Bush ( le petit frère, gouverneur de Floride) et Lewis Libby, directeur de cabinet de Cheney. Ce document public intitulé " Projet pour le nouveau siècle américain " est très explicite : " tandis que le conflit non résolu avec l'Irak offre une justification immédiate, le besoin d'une force américaine substantielle dans le Golfe dépasse la question du régime de Saddam Hussein ", " même si Saddam quitte la scène, les bases US en Arabie et au Koweït devront rester en permanence ". Le document appelle à la création d'un " champ de forces " comportant la domination de l'espace, le contrôle total du cyberespace un système mondial de contrôle et de commandement et le développement d'armes biologiques " pouvant cibler des génotypes spécifiques et transformer la guerre biologique en instrument politique puissant " (ce qui veut dire des armes permettant de tuer des personnes présentant tel ou tel caractère physique). Et Michael Mâcher conclut : " il s'agit d'un projet de domination mondiale par les Etats-Unis ".

II s'attarde ensuite sur les attentats eux-mêmes : " il est clair que les autorités US n'ont rien fait ou très peu pour les éviter " puisque ils avaient été alertés à ce sujet par deux responsables des services secrets israéliens venus tout exprès à Washington en août 2001 avec une liste de 200 terroristes qui comprenaient quatre noms des pirates du 11Septembre. Il relève que 15 des pirates du 11.09 ont bénéficié de visas établis en fraude par le responsable de la CIA en Arabie et que cinq d'entre eux se sont entraînés au pilotage dans des bases militaires US.

Il relève que les procédures de l'armée de l'air en vigueur en cas de détournement d'avion civil ont mal fonctionné le 11.09 et seulement après le troisième détournement alors qu'elles ont été utilisées 65 fois de septembre 200 à juin 2001.

Sensible aux questions de pollution il note que la Maison Blanche soucieuse d'assurer le redémarrage rapide de la bourse de New York, toute proche des deux tours, a donné ordre de ne pas respecter les mesures de protection légales des personnels de secours intervenant dans les décombres du World Tarde Centre. Ainsi ceux-ci ont absorbé en abondance des poussières d'amiante et de plomb et leurs jours sont maintenant en danger.

Et il conclut " les attentats du 11.09 ont permis aux Etats-Unis d'appuyer sur le bouton " GO " de la stratégie définie par le projet pour un nouveau siècle américain ce qui aurait été politiquement impossible autrement.

Au total pas de grandes découvertes mais un signe parmi d'autres que la classe dirigeante confrontée à la résistance irakienne et à une opposition grandissante à la poursuite de la guerre est traversée de fortes contradictions internes.

L'armée US en manœuvres :

A côté des guerres en vari il y a les préparatifs dont les plus visibles sont les manœuvres militaires. L'armée US manœuvre beaucoup.

En Georgie d'abord où par l'intermédiaire des quelques centaines de " conseillers militaires " elle intensifie son appui à l'armée géorgienne. Depuis la disparition de l'URSS, la Georgie s'est en effet résolument rangée dans le camp des Etats-Unis et présente pour eux un double intérêt : d'abord une surveillance de la frontière Sud de la Tchétchénie qui fait de la Georgie le meilleur point d'observation et d'interventions secrètes dans la république caucasienne en guerre, d'autre part un point de passage obligé pour le grand pipeline Bakou, Tbilissi, Ceyhan ( BTC) destiné à transporter l'abondant pétrole de la Caspienne vers la côte Méditerranéenne de la Turquie pour lui donner un accès facile au marché mondial. Mais ce projet, conduit par la BP et d'autres sociétés occidentales dont Total, et annoncé depuis des années tarde à se concrétiser tant la situation politique des territoires à traverser est instable : tensions entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie, tensions en Georgie où des provinces entières sont en rébellion contre le gouvernement central, tensions dans le Kurdistan turc, et les bulldozers ne pourront guère commencer à travailler que sous la protection des tanks ce qui ne réjouit guère les sociétés de construction.

Un invité remarqué à ces manœuvres : le premier ministre de Lituanie qui s'apprête, en intégrant l'OTAN, à devenir un fidèle allié des Etats-Unis dans sa région et qui sera là-bas chargé de la surveillance rapprochée de l'enclave russe de Kaliningrad et de ses installations militaires.

En Inde aussi où le gouvernement nationaliste, qui vient d'accueillir Sharon en visite officielle, ne manque jamais une occasion de manifester que l'ère de l'amitié russo-indienne est achevée et que la Chine est pour l'Inde comme pour les Etats-Unis le principal adversaire stratégique. D'où les récentes manœuvres communes Inde-USA à la frontière chinoise. Cette politique, comme la visite de Sharon lui-même, suscite de nombreuses manifestations de protestation dans tout le pays.

D'une façon générale, l'armée US manœuvre beaucoup aux quatre coins de l'Asie et toujours au plus prés des frontières russe et chinoise.

En Asie, même si c'est sur un mode mineur, la guerre froide se poursuit.

L'armée US en difficulté en Irak

Conscient des difficultés qu'il a à contrôler la situation en Irak, le Pentagone essaie en même temps de ne pas y enfermer ses meilleures troupes qu'il pourrait envoyer ailleurs. D'où le recours massif à des substituts :

- des mercenaires d'abord : l'armée US a recruté 40000 latinos candidats à la naturalisation et qui ont la promesse de l'obtenir si bien sûr, ils reviennent vivants du Moyen-Orient. Le succès n'est pas assure car, selon l'association qui défend ces soldats, ils sont envoyés dans les endroits les plus dangereux. Pour mieux les appâter, il leur est promis une prime de 50000 dollars pour s'inscrire à l'université à leur retour des combats.

- des sous-traitants polonais, ukrainiens, nicaraguayens et espagnols et Bush, sans succès pour l'instant, voudrait bien impliquer d'autres armées étrangères

- des réservistes et des éléments de la Garde Nationale dont ce n'est pourtant pas le rôle

Pour l'armée US, les bilans physiques de la guerre d'Irak sont lourds :

- plus de 100 morts après la fin officielle de la guerre (premier mai)

- des centaines de blessés

- plus de 6000 rapatriés sanitaires sur lesquels les informations officielles sont maigres : chocs psychologiques, conséquences de vaccinations multiples contre toutes les armes chimiques ou biologiques possibles, exposition aux aérosols radioactifs liés à l'utilisation de munitions à l'uranium appauvri ce qui expliquerait les nombreux cas de pneumonie connus.

Sous les casques bleus, le tiers-monde

L'ONU tient méticuleusement à jour l'état des forces militaires et de police qui interviennent sous ses couleurs sur décision du Conseil de Sécurité.

Au 31 Juillet 2002,sur une total de 38000 hommes les principaux contributeurs sont : Pakistan 3910, Bangladesh 3137, Inde 2870, Nigéria 2523 , Ghana 2007, Uruguay 1800, Kenya 1789, Jordanie 1590, Afrique du Sud 1410, Ukraine 925.

Les pays riches réservent leurs troupes pour la défense de leurs intérêts propres. Ainsi les Etats-Unis dans le même temps où ils envoient 180000 hommes en Irak, ne fournissent à l'ONU que 519 hommes, le Royaume Uni 605, l'Allemagne 375, la France 319, l'Italie 178.

Ces chiffres montrent bien la hiérarchie des tâches : les soldats de la paix pas trop chers payés, sont recrutés dans les pays pauvres et sont envoyés dans des zones non stratégiques, les Etats-Unis eux font vraiment la guerre et interviennent massivement dans les zones stratégiques.

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