Semaine 41- 2003
Anniversaire : Début
de la guerre Iran/Irak
Le 20 Septembre, L’Iran
a célébré avec le maximum de faste l’anniversaire de l’invasion du pays par
l’Irak en 1980. On se souvient qu’après une période de progression rapide
de l’armée irakienne en territoire iranien dans la région d’Abadan, l’Iran
se ressaisit et repousse l’agresseur. La guerre va alors devenir une guerre
de position sur la frontière où aucun des adversaires n’aura l’avantage. En
coulisse et bien que l’Iran soit l’ennemi désigné, les Etats-Unis feront d’ailleurs
tout (Irangate) pour qu’il n’y ait pas de vainqueur et que les deux adversaires
s’épuisent l’un l’autre.
Bilan : plus d’un million de morts, une majorité du côté iranien, un effondrement des cours du pétrole à partir de 1986 puisque deux des principaux membres de l’OPEP se battent et vendent à n’importe quel prix pour financer l’effort de guerre. Autant les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979 auront été médiatisés en Occident, autant le contre choc pétrolier de 1986 sera passé sous silence.
Ce 20 septembre, l’Iran a donc fait une démonstration de sa puissance militaire en faisant défiler dans les rues de Téhéran les nouveaux missiles SHAHAB 3 et en soulignant bien que leur portée est de 1500 Km ce qui veut dire qu’ils peuvent atteindre Israël. Il s’est donc agi de la réponse du gouvernement de Téhéran aux menaces des Etats-Unis et de l’Union Européenne sur le programme nucléaire iranien. Ainsi l’escalade est lancée mais les durs du régime iranien ont beau jeu de faire valoir que l’Iran est aujourd’hui encerclé par trois puissances nucléaires : Israël, Inde et Pakistan.
Brèves
1. Deux Georgies aux USA
?
Les relations entre
la Georgie (au bord de la Mer Noire – capitale Tbilissi) et les Etats-Unis
sont si fraternelles que des humoristes étasuniens disent que l’Union compte
désormais deux Georgies : l’ancienne, capitale Atlanta, la nouvelle, capitale
Tbilissi. Ainsi le Sénat US vient-il de voter une aide militaire de 70 millions
de dollars à la nouvelle Georgie. Une goutte d’eau dans la mer par rapport
au budget de la défense US qui avoisine 500 milliards de $ mais une aide énorme
pour la Georgie dont le budget militaire n’était que de 30 millions de $.
Cette générosité justifie la présence permanente de plusieurs centaines de
conseillers militaires et les visites de plus en plus fréquentes de généraux
US sur place. Au carrefour des routes du pétrole et du terrorisme, la nouvelle
Georgie est décidément un pays très attirant.
2 -La vie de Chavez menacée
:
Le Président a annulé subitement une visite officielle aux Etats-Unis et a
déclaré à la télévision que les services de renseignement vénézuéliens l’avaient
informé d’un plan de sabotage de l’avion présidentiel.
3- L’Inde (un peu) gênée
Après avoir accueilli Ariel Sharon en grand ami et après lui avoir acheté
pour prés de 2 milliards de $ d’armement, l’Inde est un peu gênée dans ses
relations avec ses voisins arabes. Ainsi le vice ministre indien des affaires
étrangères reçu en Arabie Saoudite a-t-il été obligé de minimiser la portée
de la visite de Sharon en Inde et de souligner que l’Inde n’avait pas une
politique anti-arabe puisqu’elle refusait d’envoyer des troupes en Irak. Les
paroles passent, les armes restent ...
4 – Le roi du Maroc cherche
à nouer des relations diplomatiques avec Israël
et, pour montrer ses bonnes dispositions vis-à-vis du camp de la guerre, il
accueille sur son territoire, selon un récent rapport d’Amnesty International,
des prisonniers faits par l’armée US en Afghanistan et en Irak et qui ne sont
pas mis en cage à Guantanamo
5 – Des irakiens en Hongrie
Pour célébrer son intégration récente dans l’OTAN , la Hongrie fait du zèle
et va accueillir sur son territoire une école de formation pour la nouvelle
police irakienne. Les instructeurs viendront des Etats-Unis et seront ainsi
moins en danger qu’à Bagdad ou Basra et les 28 000 irakiens attendus seront
de leur coté soustraits, au moins temporairement, à l’influence de la population
et de la résistance irakienne. Cela ne leur évitera pourtant pas d’être à
leur retour pris pour cibles par des soldats US de plus en plus nerveux et
qui ont déjà abattu plusieurs dizaines de policiers irakiens.
Berlusconi récompensé
:
Le bouffon cynique Berlusconi vient de recevoir à New York le prix d’une fondation
créée à l’origine pour lutter contre le négationnisme « ANTI DEFAMATION LEAGUE
». Peu importe qu’il ait quelques jours plus tôt honteusement falsifié l’histoire
de l’Italie en affirmant que Mussolini avait simplement « prié les juifs italiens
de partir en vacances » alors que dés 1938 les juifs italiens étaient déchus
de leur nationalité, leurs enfants exclus des écoles et autres mesures discriminatoires
... et que Mussolini avait approuvé et soutenu la « solution finale » mise
en œuvre par le régime nazi à partir de 1941.On doit à un déporté juif italien,
Primo Levi, un des plus poignants témoignage (« Si c’est un homme ») sur les
camps de la mort. Il est vrai que Berlusconi, partageant le pouvoir avec les
néofascistes, partage aussi largement leurs idées. La Fondation, interrogée
sur le bien fondé de la remise de ce prix à un chef de gouvernement ayant
tenu quelques jours plus tôt des propos falsifiant l’histoire du peuple juif
et de ses souffrances (ce qui est très exactement du négationnisme), a répondu
que l’important était le soutien de Berlusconi à la politique de l’Etat d’Israël.
Conclusion ahurissante : pourvu que vous soyez pro sioniste, vos pouvez vous laisser aller à tenir les propos négationnistes les plus débridés !
Nous reproduisons ci-après la conclusion d’un article de Zvi Schuldiner paru à ce sujet dans le quotidien italien « Il Manifesto »
"Mais il suffit que Monsieur Berlusconi se prononce contre la terreur et appuie la politique criminelle de Sharon, pour qu’il soit bien vu par de nombreux juifs qui, pour les motifs les plus divers, sont tombés dans le piège facile et dangereux de l’appui inconditionnel à la politique du gouvernement israélien. La Anti-defamation League, qui luttait au nom de l’histoire, a oublié l’histoire. Pire encore, elle oublié toute notion de honte. Donner un prix à ce Berlusconi, nouvel historien du fascisme, équivaut à cracher sur la mémoire des victimes, cracher sur les camps d’extermination. C’est simplement une honte ! "
Paru dans il manifesto,
édition du 25 septembre 2003 http://www.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/25-Settemnbre-2003/art66.html
Traduction Comaguer
Wesley Clark, un général pacifiste ?
Le nouveau venu dans la course à l’investiture chez les démocrates pour la
présidentielle de 2004 est un général en retraite : Wesley Clark. Il est tout
à fait regrettable, voire troublant, que ce personnage ait été présenté par
Michael Moore comme un pacifiste car les colombes de cet acabit sont de dangereux
rapaces. Les derniers exploits militaires de Wesley Clark remontent au bombardement
de la Yougoslavie par l’OTAN en 1999 puis qu’il commandait à l’époque les
forces de l’OTAN. On lui doit donc les bombardements de civils, de trains,
de ponts, de l’immeuble de la télévision et de l’ambassade Chine à Belgrade
quelques milliers de morts innocents et autres « dégâts collatéraux ». L’armée
yougoslave, passée maître dans l’art du camouflage, a elle peu souffert. Auparavant
Wesley Clark avait commandé les forces US en charge de la formation des armées
d’Amérique Latine et des interventions directes des forces secrètes des USA
dans ce continent, mauvaise habitude contractée au 19° siècle et dont la classe
dirigeante et les multinationales US ont beaucoup de mal à se défaire.
En 2002 il déclarait sur CNN que l’Irak détenait des armes de destruction massive et qu’il fallait l’attaquer. Aujourd’hui son « pacifisme » le conduit simplement à déclarer qu’il faut alléger l’effort de guerre US en Irak ce qui est exactement ce que souhaitent Bush et le Pentagone, et s’occuper des affaires vraiment sérieuses, c’est à dire de la Chine, la puissance montante qui commence à faire de l’ombre au géant.
Les stratèges US n’ignorent pas que les produits chinois envahissent le marché US que la banque centrale de Chine détient d’énormes masses de dollars et qu’elle n’hésite pas à en prêter aux USA pour combler leur déficit budgétaire « abyssal ». Les prêts s’élèvent aujourd’hui à prés de 180 milliards de $.
Wesley Clark est donc un bien étrange pacifiste qui voudrait achever la guerre en cours pour avoir les mains libres pour en entamer une autre.
Rodomontades
Pas surprenant que Chirac profite de l’enlisement de l’armée US en Irak pour
jouer les donneurs de leçon à l’ONU. Ne pas oublier cependant que la République
française reste un empire, même petit, puisque grâce à ses département et
territoires d’outre-mer elle est la troisième puissance maritime mondiale
en termes d’eaux territoriales, qu’elle déploie 30 000 soldats à l’étranger,
que le budget de la défense augmentera de 4% en 2004 ( et de 9% pour les seules
dépenses d’équipement) et que ce budget est qualifié de « sanctuarisé » c’est
à dire intouchable, ni par les « eurocrates », ni par Raffarin ni par le Parlement.
Les victimes irakienne
Autant les comptes des morts et blessés de l’armée US en Irak sont rigoureusement
tenus à jour (la pression des familles y est pour beaucoup) autant les informations
sur les victimes irakiennes sont rares ou peu médiatisées. Cependant quelques
chercheurs et universitaires s’efforcent de collecter des données, de les
recouper pour éviter toute critique et de les diffuser. Ils restent prudents,
affichent des estimations ou des fourchettes.
Mais ils parviennent tous à des résultats voisins : l’invasion a fait autour de 10 000 victimes civiles dans la population irakienne, soit en gros 100 fois plus que dans l’armée US et ses filiales.
A ce sujet, il semble que les troupes mercenaires (polonaises, espagnoles, ukrainiennes et autres) soient moins exposées au feu (ou au regard de la presse ?) car il est peu fait mention de pertes dans leurs rangs. Pour la période suivant l’invasion – donc à partir du Premier Mai selon la chronologie officielle de P’tit Bush – ils n’ont encore rien affiché mais l’ordre de grandeur est de 10 à 20 morts irakiens par jour soit un total à ce jour de 1500 à 3000 morts. Il faudra ajouter à ces chiffres d’assez nombreuses disparitions puisque selon Amnesty International les armées d’occupation ont déjà emprisonné environ 20 000 personnes dont les lieux de détention sont à peu prés identifiés mais où aucun observateur neutre ne pénètre. La plus grosse prison serait dans l’aéroport de Bagdad, mais d’autres seraient ouvertes en Jordanie, au Maroc et en Afghanistan. Combien en ressortiront vivants ?
Dans son document de 60 pages, Amnesty souligne que les Etats-Unis sont en train de mettre à bas tout l’édifice du droit international existant (Conventions de Genève) pour la protection des civils et des prisonniers.