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Bulletin 78

Semaine 46 - 2003

Relance de l'armement nucléaire
Le Congés des Etats-Unis vient à nouveau de donner satisfaction au lobby militaro-industriel. Voici dix ans il avait interdit au gouvernement US de financer un programme de recherche-développement de nouvelles armes nucléaires destinées à pénétrer profondément le sol pour atteindre les états-majors ennemis et les postes de commandement enfouis sous des mètres de béton.Ces armes sont supposées épargner les populations civiles comme si l'explosion nucléaire, analogue à un tremblement de terre, n'allait pas avoir d'effet en surface, comme si les poussières radioactives allaient rester bien sagement enterrées à côté des premières victimes et il ne manque pas d'experts militaires pour dénoncer cette supercherie.
N'empêche ! Le Congrès vient d'autoriser à nouveau les travaux de recherche-développement préalables à la mise en production industrielle de ces nouvelles armes et de les financer. Bien entendu, une fois le prototype mis au point, la tentation sera grande de passer à la production en série. Les politiques seront contents de disposer d'une nouvelle menace et les industriels de vendre.

Il s'agit d'une mécanique infernale, difficile à enrayer, et d'un nouveau signe de la reprise de la course aux armements.

Pressuasion : nouveau mot, nouvelle doctrine stratégique française
Nous avons déjà signalé la modification de la stratégie nucléaire française. Un document public établi par le CHEAR lui a même donné un nom : la pressuasion. Le Centre des hautes études de l'armement est un comité interne de la Délégation générale de l'armement du Ministère de la Défense. Le nouveau concept lancé en Janvier 2003 est le fruit de la contraction de " prévention " et " dissuasion ". La pressuasion mélange armes conventionnelles et armes nucléaires pour viser des puissances régionales dotées d'armes de destruction massive. Bref il s'agit d'équiper les avions et les sous-marins de missiles capables de transporter indifféremment les deux types d'armes et donc de rendre utilisables des armes nucléaires de petite ou moyenne dimension. Il ne manque que la liste des Etats-Voyous pour que la ressemblance avec les Etats-Unis soit complète.

Georgie de l'Est
Le président Chevardnadze, ancien Ministre des Affaires étrangères de l'URSS du temps de Gorbatchev, qui avait tout fait pour se ménager les faveurs des USA : adhésion au groupe GUAM (Georgie, Ukraine, Azerbaïdjan, Moldavie) groupe hostile à la Russie,fermeture des bases militaires russes - sauf une -, accueil de conseillers militaires US pour entraîner son armée, acceptation de l'aide financière US, vente de matériel aéronautique produit dans les anciennes usines soviétiques de Tbilissi aux Etats-Unis,à la Turquie et à Israël... n'en avait sans doute pas encore fait assez. Son élection, sans doute moins trafiquée que celle de son voisin d'Azerbaïdjan dont pourtant aucun gouvernement étranger n'a contesté la régularité, n'est pas acceptée par un nouveau parti à croissance rapide qui organise des manifestations de rue pour l'obliger à démissionner.C'est que Chevardnadze n'a pas rompu tous les liens avec la Russie, D'abord parce que celle-ci soutient la rébellion d'une province géorgienne , l'Abkhazie *, contre le pouvoir central et que Chevardnadze, bien qu'aidé militairement par les USA, ne veut pas aller jusqu'à la guerre civile et ne ferme pas toutes les portes avec Moscou, ensuite parce qu'il a passé récemment un accord avec la Russie pour recevoir du gaz russe, accord dont il s'est félicité en observant que les conseillers militaires US c'était bien, mais que le gaz russe pour chauffer les maisons de Georgie c'était aussi très utile et apprécié par la population d'un pays très appauvri.
Sa cote, en même temps qu'elle remontait chez ses électeurs, a donc brusquement chuté aux Etats-Unis où on aimerait bien lui trouver un successeur plus docile et plus franchement anti-russe. Rien de surprenant donc au fait que Chevardnadze accuse maintenant ses opposants d'être financés par George Soros, le grand maître de la spéculation financière mondiale (hongrois d'origine, installé aux Etats-Unis et sponsor de la famille Clinton), au moment où celui-ci est mal vu à Moscou.Il est vrai que, dans un pays si pauvre, quelques millions de dollars permettent très facilement de créer des journaux, des chaînes de télévision et de faire monter en quelques mois une opposition en forme de soufflé médiatico-politique dont la recette a été élaborée dans de lointaines cuisines ...

Un signe supplémentaire de la nouvelle guerre froide lancée par les Etats-Unis et les multinationales du pétrole dont l'objectif est de réduire encore le pouvoir du gouvernement russe sur son propre pays et de s'assurer le contrôle total de la Georgie, plaque tournante du transport des hydrocarbures de la Caspienne.

*L'Abkhazie est intégrée à la république de Georgie au moment de la constitution de l'URSS.Quand l'URSS se dissout, les abkhazes tentent de prendre leur indépendance. Après plusieurs années de guerre, un statu-quo s'établit. Mais il est chancelant : pour la Georgie, l'Abkhazie est désormais une république autonome, alors que l'Abkhazie, clairement soutenue par Moscou depuis 1999, s'est proclamée République indépendante mais n'a pas été reconnue internationalement. Il y a des troupes russes en Abkhazie et des forces spéciales US en Georgie.Un très bel abcès diplomatique quand on sait, qu'en outre, les conseillers militaires US à l'ouvre en Georgie entraînent la petite marine géorgienne et des commandos susceptibles de débarquer sur les côtes abkhazes.

La Russie en accusation
L'affaire Youkos prend de plus en plus des dimensions de crise internationale. Poutine a résisté aux multinationales et il est donc mis en accusation directement par la Maison Blanche.Ceci traduit la déception des pétroliers US Exxon et Chevron qui étaient sur le point de mettre la main sur le trésor pétrolier russe ( Youkos contrôlerait environ 25 % des réserves pétrolières russes) et aussi la puissance du groupe bancaire fondé par Khodorkovsky et qui contrôle Youkos. Ce groupe, MENATAEP, a son siège à Gibraltar, un paradis fiscal sous drapeau britannique en plein cœur de l'Union Européenne, et il compte dans son Conseil d'administration le gratin du bizness transnational.
Quelques noms :

Etonnez-vous après ça que l'incarcération de Khodorkovsky ait eu un retentissement mondial. Margery Kraus travaille...

Le gouvernement italien viole la constitution
La mort de soldats italiens en Irak a rappelé l'engagement fort du gouvernement Berlusconi aux côtés de Bush. Cet engagement a été très critiqué par l'opinion publique italienne, mais moins par les partis politiques. Pourtant ils auraient du se souvenir que l'article 11 de la Constitution stipule " L'Italie répudie la guerre comme instrument d'atteinte à la liberté des autres peuples et comme moyen de solution des controverses internationales ; elle consent, à condition de parité avec les autres Etats, aux limitations de souveraineté nécessaires à un ordre qui assurer la paix et la justice au sein des nations ; elle propose et favorise les organisations internationales qui poursuivent un tel but. "

S'il avait respecté ce texte, Berlusconi n'aurait jamais pu soutenir Bush dans ses aventures militaires.

Mais, bien encadré par les néofascistes qui s'organisent pour l'évincer bientôt du pouvoir, il méprise et ignore cette constitution élaborée en 1947 avec la volonté d'effacer le lourd passé mussolinien. Pour concrétiser cette orientation belliciste, il n'a pas hésité à faire voter par le Parlement une loi (parue dans la Gazette officielle le 27.07.2003) qui autorise l'armée italienne à utiliser des armes chimiques et des munitions à l'uranium appauvri. Les irakiens sont prévenus !
La seule réaction de la classe politique Italienne à cette mesure est venue des Verts. Heureusement, une association nationale pour la sauvegarde de la Constitution est maintenant constituée et entreprend de remonter le courant.

Un nouveau tribunal pénal international au Sierra Leone
Les Etats-Unis font campagne pour créer un nouveau tribunal international installé au Sierra Leone et destiné à juger les auteurs des crimes de guerre commis dans ce pays. La plupart des coupables sont morts et ne reste en vie que l'ancien dictateur du Libéria : Charles Taylor qui avait inspiré et soutenu les criminels. Celui-ci a les mains couvertes de sang mais les Etats-Unis qui étaient d'accord pour le laisser se réfugier au Nigéria voisin où il est sous la protection du gouvernement voudraient maintenant en finir avec lui en le faisant condamner par un tribunal fait sur mesure dont ils tireraient toutes les ficelles et où l'on éviterait de parler à trop haute voix de la complicité des Etats-Unis avec toutes les horreurs commises au Sierra Leone.
Toujours fidèles à leurs méthodes " Far West ", les Etats-Unis offrent une prime de 2 millions de dollars pour sa capture. La somme a été ajoutée au budget pour les guerres d'Afghanistan et d'Irak voté récemment par le Congrès.Les quatre chefs d'état africains (Nigéria, Afrique du Sud, Mozambique, Ghana) qui, sans entretenir aucune illusion sur le personnage, avaient convaincu Taylor de se retirer pour rendre possible le processus de paix au Libéria et l'avaient eux-mêmes accompagné dans sa retraite au Nigéria, sont ridiculisés par les Etats-Unis. Mais ce que ceux-ci recherchent c'est une nouvelle occasion de remplacer la Cour Pénale Internationale, dont ils ne veulent à aucun prix, par une juridiction croupion à leur dévotion où ils pourront tenter de faire croire qu'ils favorisent le châtiment des criminels de guerre.( En même temps, la prime est une forte incitation au meurtre sachant que Taylor n'est pas en fuite et que sa résidence au Nigéria est connue et le risque existe qu'il soit mort avant d'arriver devant le tribunal sierra léonais qu'on lui prépare.)
Les Etats-Unis manifestent ainsi à nouveau leur refus catégorique de se soumettre à la juridiction de la Cour Pénale Internationale. Ils sont accompagnés dans ce refus par la Chine et la Russie et en plus mènent campagne contre sa signature. Pour ce faire, ils signent des accords bilatéraux avec des pays dans lesquels ceux-ci s'engagent à ne pas poursuivre des citoyens US - civils ou militaires - devant la CPI. Il s'agit en général de pays pauvres et un gros chèque en dollars permet de faire taire leurs scrupules (exemples récents : la Roumanie et Timor Oriental). Et le comble est atteint avec la loi votée par le Congrès qui autorise le gouvernement US à enlever un citoyen ou un soldat US qui serait accusé par un des quelques 140 Etats qui ont signé le traité et reconnaissent la compétence de la CPI. On imagine le spectacle : des commandos US, le visage peint, jaillissant en pleine nuit d'un hélicoptère de combat dans La Haye (où siègera la CPI) et venant délivrer au lance-roquettes l'inculpé étasunien.
Pour les Etats-Unis, la politique internationale est un immense western.

Un anniversaire
Voici 30 ans, en Octobre 83, Reagan lançait les forces spéciales des Etats-unis à l'assaut de la petite île caraïbe de Grenade. Ce pays était dirigé depuis 1979 par une équipe qui s'inspirait de l'exemple cubain, était soutenue par Cuba et avait décidé de rendre la médecine et l'éducation gratuites. Malheureusement un conflit, encore aujourd'hui mal élucidé au sein de l'équipe dirigeante, tourna au drame puisque le Premier Ministre, Maurice Bishop, fut assassiné par un de ses adjoints qui s'empara du pouvoir avec l'armée. Prenant prétexte de ce coup d'état Reagan décida l'invasion et installa un gouvernement pro US. Le succès militaire fut évidemment très facile mais vint à point nommé pour effacer l'attentat dont avaient été victimes quelques jours plus tôt les marines US à Beyrouth. Cette invasion fut le premier acte de la première guerre contre le terrorisme initiée par Reagan.

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