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Bulletin 86

Semaine 05- 2004

Souvenirs : Lénine Il y a 80 ans mourait Lénine.
Sans se livrer à l'exercice du bilan historique qui a déjà rempli des volumes et qui n'est pas dans nos préoccupations immédiates il n'est par contre pas inutile dans la situation de tension internationale entretenue jour après jour par les Etats-Unis sous toutes les latitudes de rappeler la relation étroite entre la guerre de 14-18 et la révolution russe de 1917. L'annonce par les bolcheviques de leur volonté de faire la paix à tout prix traduisait l'extrême lassitude de la population russe face à la guerre, à ses souffrances et à ses horreurs et se débarrasser du tsarisme qui avait engagé le pays dans ce conflit meurtrier était la condition de la paix. Effectivement, dans un premier temps la révolution a arrêté la guerre et les bolcheviques après avoir renversé le régime en Octobre 1917 ont négocié et signé à Brest-Litovsk début 1918 un traité, aux conditions très dures en termes financiers et territoriaux, mais qui mettait fin au conflit et eut à l'époque un énorme écho à l'Ouest du continent dans les tranchées où des centaines de milliers d'hommes attendaient, dans un conflit qui semblait ne devoir jamais finir, la mort dans la boue et le froid.
Ce répit allait être de courte durée puisque sitôt le Reich vaincu, les vainqueurs ; Grande-Bretagne et France, allaient s'en prendre militairement au nouveau régime et soutenir autant qu'ils le purent les russes blancs qui voulaient rétablir la monarchie.La guerre civile dura 3 ans. Elle était effectivement civile puisque s'affrontaient les révolutionnaires regroupés autour des bolcheviques et les partisans du tsarisme mais en même temps internationale puisque des troupes étrangères (françaises et britanniques) combattaient aux côtés des russes blancs).
En particulier et ce rappel n'est pas sans intérêt aujourd'hui, la Georgie, jadis province de l'empire russe, avait proclamé son indépendance en 1918 et servait de base aux troupes anglaises qui pénétraient en territoire russe et combattaient les " rouges ".
Il reste que le renoncement des révolutionnaires russes à la guerre fut un évènement politique de première grandeur car il était une première réponse de masse à l'ère des guerres de masse ouverte par la première guerre mondiale. La décision de Lénine, proscrit à la suite de la révolution manquée de 1905, de rentrer clandestinement dans son pays était le fruit d'une réflexion politique entamée par les socialistes depuis le début de la guerre. Observateurs lucides , les socialistes du monde entier et d'Europe en particulier avaient bien vu la guerre arriver, en avaient bien compris le caractère principal d'affrontement entre impérialismes concurrents et s'était promis dans les congrès de la II° Internationale où ils s'étaitn retrouvés avant 1914 de tout faire pour s'y opposer. Ce n'est pas ce qui se passa, la propagande patriotique l'emporta et les et les partis socialistes en particulier en France après l'assassinat de Jaurès et en Allemagne basculèrent dans le soutien à la guerre et se virent aussitôt offrir des places dans les gouvernements d'Union Nationale. Ceux qui, très peu nombreux, s'opposèrent, soit s'exilèrent, soit furent condamnés au silence, soit emprisonnés comme Rosa Luxembourg. Après diverses tentatives infructueuses, ces socialistes minoritaires réussirent à tenir une conférence socialiste internationale, en terrain neutre, à Zimmerwald en Suisse, du 5 au 8 Septembre 1915. Ils étaient 19 délégués venant d'Allemagne, de France, d'Italie, d'Angleterre, de Russie (dont Lénine), de Pologne, de Roumanie, de Bulgarie, de Suède, de Norvège, de Hollande et de Suisse.
La conférence adopta plusieurs textes qui, à quelques nuances de vocabulaire prés, restent d'une brûlante actualité même si aujourd'hui il n'y a pas affrontement direct entre impérialismes de puissance comparable mais tentative de domination d'un seul impérialisme.
Le premier de ces textes était une " déclaration franco-allemande commune aux socialistes et syndicalistes français et allemands " :

"Après un an de massacre, le caractère nettement impérialiste de la guerre s'est de plus en plus affirmé; c'est la preuve qu'elle a ses causes dans la politique impérialiste et coloniale de tous les gouvernements, qui resteront responsables du déchaînement de ce carnage.
Les masses populaires furent entraînées dans cette guerre par l'" Union sacrée ", constituée dans tous les pays par les profiteurs du régime capitaliste, lui ont donné le caractère d'une lutte de races, de défense des droits respectifs et des libertés. C'est sous l'impulsion de ces sentiments que, dans chaque pays, une très grande partie des forces ouvrières d'opposition ont été submergées par le nationalisme et, depuis, une presse aux ordres du pouvoir n'a cessé d'en accentuer le caractère.
Aujourd'hui, les chauvins de chaque nation assignent à cette guerre un but de conquête par l'annexion de provinces ou de territoires; ces prétentions, si elles se réalisaient, seraient des causes de guerre future.
En opposition à ces ambitions, des minorités résolues se sont dressées dans toutes les nations, s'efforçant de remplir les devoirs affirmés dans les résolutions des Congrès socialistes internationaux de Stuttgart, Copenhague et Bâle. Il leur appartient, aujourd'hui plus que jamais, de s'opposer à ces prétentions annexionnistes et de hâter la fin de cette guerre, qui a déjà causé la perte de tant de millions de vies humaines, fait tant de mutilés et provoqué des misères si intenses parmi les travailleurs de tous les pays.
C'est pourquoi nous, socialistes et syndicalistes allemands et français, nous affirmons que cette guerre n'est pas notre guerre !
Que nous réprouvons de toute notre énergie la violation de la neutralité de la Belgique, solennellement garantie par les conventions internationales admises par tous les États belligérants. Nous demandons et ne cesserons de demander qu'elle soit rétablie dans toute son intégralité et son indépendance. Nous déclarons que nous voulons la fin de cette guerre par une paix prochaine, établie sur des conditions qui n'oppriment aucun peuple, aucune nation;
Que nous ne consentirons jamais à ce que nos gouvernements respectifs se prévalent de conquêtes qui porteraient fatalement dans leur sein les germes d'une nouvelle guerre;
Que nous œuvrerons, dans nos pays respectifs, pour une paix qui dissipera les haines entre nations, en donnant aux peuples des possibilités de travailler en commun.
Une telle paix n'est possible, à nos yeux, qu'en condamnant toute idée, toute violation des droits et des libertés d'un peuple. L'occupation de pays entiers ou de provinces ne doit pas aboutir à une annexion. Nous disons donc : Pas d'annexions, effectives ou masquées ! Pas d'incorporations économiques forcées, imposées, qui deviendraient encore plus intolérables par le fait consécutif de la spoliation des droits politiques des intéressés !
Nous disons que le droit des populations de disposer de leur sort doit être rigoureusement observé.
Nous prenons l'engagement formel d'agir inlassablement dans ce sens, dans nos pays respectifs, pour que le mouvement pour la paix devienne assez fort pour imposer à nos gouvernants la cessation de cette tuerie.
En dénonçant l' " Union sacrée ", en restant fermement attachés à la lutte de classe, qui servit de base à la constitution de l'Internationale socialiste, nous, socialistes et syndicalistes allemands et français, puiserons la fermeté de lutter parmi nos nationaux contre cette affreuse calamité et pour la fin des hostilités qui ont déshonoré l'humanité."

Le second était un manifeste adressé aux Prolétaires d'Europe et qui commence ainsi :

" Prolétaires d'Europe !

Voici plus d'un an que dure la guerre ! Des millions de cadavres couvrent les champs de bataille. Des millions d'hommes seront, pour le reste de leurs jours, mutilés. L'Europe est devenue un gigantesque abattoir d'hommes. Toute la civilisation créée par le travail de plusieurs générations est vouée à l'anéantissement. La barbarie la plus sauvage triomphe aujourd'hui de tout ce qui, jusqu'à présent, faisait l'orgueil de l'humanité.
Quels que soient les responsables immédiats du déchaînement de cette guerre, une chose est certaine : la guerre qui a provoqué tout ce chaos est le produit de l'impérialisme. Elle est issue de la volonté des classes capitalistes de chaque nation de vivre de l'exploitation du travail humain et des richesses naturelles de l'univers. De telle sorte que les nations économiquement arriérées ou politiquement faibles tombent sous le joug des grandes puissances, lesquelles essaient, dans cette guerre, de remanier la carte du monde par le fer et par le sang, selon leurs intérêts.
C'est ainsi que des peuples et des pays entiers comme la Belgique, la Pologne, les Etats balkaniques, l'Arménie, courent le risque d'être annexés, en totalité ou en partie, par le simple jeu des compensations.
Les mobiles de la guerre apparaissent dans toute leur nudité au fur et à mesure que les événements se développent. Morceau par morceau, tombe le voile par lequel a été cachée à la conscience des peuples la signification de cette catastrophe mondiale.
Les capitalistes de tous les pays, qui frappent dans le sang des peuples la monnaie rouge des profits de guerre, affirment que la guerre servira à la défense de la patrie, de la démocratie, à la libération des peuples opprimés. Ils mentent. La vérité est qu'en fait, ils ensevelissent, sous les foyers détruits, la liberté de leurs propres peuples en même temps que l'indépendance des autres nations. De nouvelles chaînes, de nouvelles charges, voilà ce qui résultera de cette guerre, et c'est le prolétariat de tous les pays, vainqueurs et vaincus, qui devra les porter.
Accroissement du bienêtre, disait-on, lors du déchaînement de la guerre.
Misère et privations, chômage et renchérissement de la vie, maladies, épidémies, tels en sont les vrais résultats. Pour des dizaines d'années, les dépenses de la guerre absorberont le meilleur des forces des peuples, compromettront la conquête des améliorations sociales et empêcheront tout progrès.
Faillite de la civilisation, dépression économique, réaction politique, voilà les bienfaits de cette terrible lutte des peuples.
La guerre révèle ainsi le caractère véritable du capitalisme moderne qui est incompatible, non seulement avec les intérêts des classes ouvrières et les exigences de l'évolution historique, mais aussi avec les conditions élémentaires d'existence de la communauté humaine.
Les institutions du régime capitaliste qui disposaient du sort des peuples : les gouvernements - monarchiques ou républicains -la diplomatie secrète, les puissantes organisations patronales, les partis bourgeois, la presse capitaliste, l'Eglise : sur elles toutes pèse la responsabilité de cette guerre surgie d'un ordre social qui les nourrit, qu'elles défendent et qui ne sert que leurs intérêts.
Ouvriers !
Vous, hier, exploités, dépossédés, méprisés, on vous a appelés frères et camarades quand il s'est agi de vous envoyer au massacre et à la mort. Et aujourd'hui que le militarisme vous a mutilés, déchirés, humiliés, écrasés, les classes dominantes réclament de vous l'abdication de vos intérêts, de votre idéal, en un mot une soumission d'esclaves à la paix sociale. On vous enlève la possibilité d'exprimer vos opinions, vos sentiments, vos souffrances. On vous interdit de formuler vos revendications et de les défendre. La presse jugulée, les libertés et les droits politiques foulés aux pieds : c'est le règne de la dictature militariste au poing de fer.
Nous ne pouvons plus ni ne devons rester inactifs devant cette situation qui menace l'avenir de l'Europe et de l'humanité. "

Des 19 signataires de ce texte, seul Lénine eut la possibilité, après la prise du pouvoir en Russie, de mettre en application ces idées, mais elles redeviennent d'une évidente actualité.

L'union dans un drôle d'état
Tout à la préparation de sa campagne électorale, Bush n'a pas fait dans la nuance dans son traditionnel discours sur l'état de l'Union et a réaffirmé que les Etats-Unis, auxquels il s'identifie totalement, décidaient seuls de tout et n'avaient aucun compte à tenir de l'avis d'autrui pour la conduite des affaires mondiales qui ne sont jamais qu'une extension des affaires nationales. Pour faire pièce à cet aveuglement, un quotidien anglais - The Independant - a publié le 20 Janvier un " Contre-état de l'Union " qui devrait inciter un gouvernement doué de raison à plus de réalisme à défaut d'une modestie bien rare à ces hauteurs du pouvoir.Ce Contre-état n'a pas l'emphase des discours présidentiels. Il se contente de présenter des faits auxquels COMAGUER a ici et là ajouté quelques brefs commentaires ou explications (en italique).Le voici :

CONTRE-ETAT DE L'UNION
LES HOMMES

L'ARGENT, LES RECORDS

SOCIAL

L'ARMEE

RESULTAT
Le 26.09.2001, juste après les attentats de New-York, 90% des citoyens US considèrent que Bush fait bien son métier de président Le 16 Janvier 2004 ils ne sont plus que 53 % !

Au voleur : Bush s'approprie Martin Luther King !
Aux élections de 2000, Bush n'a obtenu que 2% des voix de l'électorat noir du pays. Il essaie donc par tous les moyens d'améliorer un peu ce score. Pour ce faire, il n'a pas hésité à aller fleurir la tombe Martin Luther King à Atlanta, feignant d'oublier que l'assassinat de Martin Luther King était un crime d'Etat. Une forte protection policière a tenu ceux et celles qui manifestaient contre cette impudence à l'écart du président et Bush n'a peut-être pas entendu les slogans des manifestants qui réclamaient des crédits pour la santé et l'éducation et pas pour la guerre

Les Etats-Unis fomentent des guerres ethniques et religieuses
En Irak
Après avoir constitué un gouvernement fantoche sur la base d'un découpage ethnico-religieux dont on nous rebat les oreilles, le proconsul continue d'attiser ces conflits ethnico-religieux en laissant ouverte la possibilité d'élections qui exacerberaient les tensions entre chiites et sunnites et permettraient la prise du pouvoir par les chiites, plus nombreux.
Il s'agit de la reprise d'une démarche constante des Etats-Unis dans cette région du monde : confier l'encadrement idéologique et politique (musclé) de la population aux groupes religieux les plus extrêmes et garder les mains libres pour les affaires sérieuses (militaires et pétrolières). C'est un projet de talibanisation de l'Irak ou au moins d'une partie (le Centre et le Sud) du pays.
En effet, les projets de création au Nord d'un Etat kurde indépendant semblent beaucoup progresser et les partis kurdes irakiens rendent à la coalition tous les services possibles pour parvenir à cette fin. Pour les Etats-Unis, un tel Etat aurait un double avantage :

* Sans être encore classé au nombre des pays voyoux, la Turquie, on le voit encore à travers cet exemple, n'est plus l'allié stratégique qu'elle a été pendant toute la guerre froide.La Georgie est en train de prendre sa place comme gardien de la frontière Sud de la Russie.

En Géorgie, où Colin Powell est venu présider la cérémonie d'investiture du nouveau PDG de la filiale GEORGIE 2 de la BUSH WORLD COMPANY, un nouveau drapeau a été mis en place qui rappelle les traditions chrétiennes anciennes de cette petite république. Façon de bien faire comprendre aux musulmans qui habitent la Georgie et peuplent les provinces sécessionnistes, comme à ceux des pays voisins que les vrais amis de Washington sont des chrétiens.Pour les stratèges US, tous les moyens de diviser les populations sont bons et instrumentaliser les extrémismes religieux est un de ceux qu'ils préfèrent.

ITER : Le Japon a le triomphe modeste
Bien que la décision ne soit pas prise officiellement l'ambassadeur du Japon en France n'a pas craint dans " Le Monde " d'annoncer sous le titre explicite " Pas de guéguerre " que le Japon allait être choisi pour l'installation du réacteur expérimental ITER.Très soucieux de ménager la susceptibilité du gouvernement français, il insiste sur le fait que les divergences politiques entre les Etats-Unis et la France ne sont pour rien dans le soutien (ndlr : évidemment décisif) de Washington à la candidature japonaise.
Non, non, insiste M. Hirabayashi, le choix en faveur du site japonais s'est fait sur des critères purement techniques dont les deux principaux sont :

Quant aux risques sismiques, ils n'existent pas qu'au Japon et le site de Cadarache n'en est pas exempt.
Certain qu'il est du succès du Japon dans cette compétition politico-scientifique, M. L'ambassadeur est cependant très soucieux de dédommager la France et de panser les plaies de ce triste échec. Il prévoit donc une petite compensation. Le Japon aurait le réacteur mais la France pourrait accueillir le centre de calcul lié au réacteur. Exquise diplomatie !

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